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faim absorbe l’aliment, pour la produire ensuite au dehors, transformée en réalité vivante par l’action du sujet lui-même. Or la volonté qui est esprit, et dont l’objet est la révélation de soi-même, s’unit au désir pour imaginer cette révélation et devenir, par là même, capable de la réaliser. L’imagination fait de la volonté une magicienne. Ce que veut la volonté se détermine dans l’effort même qu’elle fait pour se le représenter. Elle veut se trouver et se saisir : par conséquent, elle veut former en soi un miroir d’elle-même ; et comme le désir est la matière sur laquelle elle travaille, elle veut que le désir infini, en se fixant sur le Bien, devienne ce miroir.

Voici donc la tâche qui s’offre maintenant à Dieu ou à la volonté : régler le désir selon la loi du Bien, et, par là, former un objet qui soit un miroir de la volonté, et où elle puisse se contempler et se reconnaître. En accomplissant cette tâche, la volonté divine va sortir du néant et conquérir la réalité.

Dieu veut se manifester, se former un miroir de lui-même. Il ne peut y parvenir que par une triple action. Il faut d’abord qu’il se pose comme volonté indéterminée, capable de vouloir le bien ou le mal. Mais une telle volonté n’est ni bonne ni mauvaise. Dieu doit sortir de cette indifférence. Il en sort en engendrant en soi le Bien unique et éternel, ou la volonté déterminée. Ce bien, qui est Dieu, n’est pas un objet ou une chose, c’est encore la volonté, mais c’est la volonté ferme et infail-