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émotions qui font mal. Et, en même temps, on s'en veut d'avance de la platitude inévitable de toute nécrologie, de la banalité de l'éloge, du froid de la notice et du jugement. Cela ressemble si peu à ce qu'on éprouve; c'est si loin de la noble image qu'on voudrait faire revivre ! On sent l'infirmité du langage humain : on est sûr de trop peu et de mal dire, de ne pas trouver les mots pour le juste et complet témoignage qu'on aspire à rendre. Il faut pourtant se vaincre et parler. Je jette ici, sous une forme improvisée, quelques idées que j'aurais voulu mûrir davantage. Je ne puis plus ni mieux en ce moment, pressé de m'acquitter, non envers une grande mémoire qui n'a pas besoin de moi, mais envers la jeunesse à qui ces Annales1 sont des- tinées. La piété à l'égard des illustres morts est une des forces morales qu'il importe le plus de cultiver dans les générations qui ont

1. Ce morceau a été publié dans les Annales de l'École libre des sciences politiques.