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la terreur en macédoine

— J’ai failli tuer Marko !… À présent, ils sont plus d’un mille, dit Joannès inquiet.

— Bah ! qu’est-ce que ça fait !… tapons toujours dans le tas ! »

Et ils tapent en effet à corps perdu. Ils oublient dans l’ivresse de la bataille cette défensive que doivent conserver, coûte que coûte, les guérillas, après le coup de main.

Joannès comprend que les patriotes vont être cernés par un adversaire trois fois supérieur. La retraite s’impose. Mais est-elle encore possible ? Il porte ses doigts à sa bouche et pousse trois coups de sifflet stridents. Puis il crie de toute sa force :

« À la bombe !… à la bombe ! »

Chaque patriote doit encore avoir dans son sac deux bombes à la dynamite.

Joannès et Nikéa, les premiers, lancent au milieu des Albanais les terribles projectiles. Ils éclatent avec leur fracas de tonnerre en faisant brèche dans la cohue frémissante qui hurle et s’effare. Cependant Marko, ne pouvant digérer sa défaite, cherche Joannès et le provoque d’une voix retentissante :

« Joannès !… où es-tu ?… je veux ma revanche !… Par la barbe de mon père !… je veux me battre et te tuer !… »

Les bombes qui éclatent en faisant d’affreux ravages ne l’arrêtent pas. Affolé par cette pensée qu’il a dû reculer, il veut laver dans le sang du jeune chef cette insulte à son prestige. Il lui semble apercevoir au milieu de la mêlée un jeune homme coiffé du bonnet bulgare et armé d’un sabre, insigne du commandement. Près de lui, un combattant jeune, imberbe, qui ne le quitte pas d’une semelle. Une femme sans