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la terreur en macédoine

Oh ! cette voix de métal !… cette voix maudite aux éclats de cymbale et que Joannès ne connaît que trop !

« Silence et à vos rangs !… chargez vos armes… baïonnette au canon !

« À vos rangs… mille tonnerres ! et silence… »

C’est la voix de Marko ! Joannès ne s’est pas trompé lorsqu’il a vu surgir l’autre locomotive. Le brigand est dans le second train.

Au commandement, les Albanais se rallient autour de leur chef. À la lueur des lampes qui éclairent chaque compartiment, on les voit se grouper, chercher leur place et prendre une irréprochable formation de combat. Ils sont près de sept cents, disciplinés, robustes, intrépides, prêts à suivre Marko jusqu’au fond de l’enfer. Malgré le péril qu’ils sentent là, tout près, dans l’ombre, nul ne bouge et ne songe à rompre le silence ou l’alignement.

Cependant, des clameurs effroyables sortent du train télescopé. Serrés, meurtris, écrasés sous les monceaux de débris, les mutilés crient à l’aide. Déjà des flammes surgissent de cet amas de boiseries peintes et forment un immense bûcher.

Terrifiés, les survivants courent, s’agitent, perdant tout sang-froid, incapables d’organiser un sauvetage bientôt devenu impossible.

Pendant que sa troupe achève de se former sur la voie même, Marko est accouru avec une compagnie.

Un cri de fureur lui échappe en présence du désastre. Les rails arrachés, tordus comme de simples fils de fer ; les traverses pulvérisées ; dans le sol, une carrière au fond de laquelle flambent les débris accumulés et grillent tout vifs les blessés.