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la terreur en macédoine

L’événement, d’ailleurs, va lui donner une fois de plus raison.

Peu à peu, les ronflements du train se rapprochent et grandissent.

Dans le lointain, à travers les ombres de la nuit, on voit une colonne de vapeur qui s’échevèle, avec des reflets d’incendie.

« Le contact ! » dit froidement Joannès à son ami.

Ce dernier, dans l’obscurité, fait quelques gestes menus, tâtonne et répond :

— C’est fait !… Voici l’appareil… tu n’auras qu’à presser au moment…

Les patriotes, accroupis, le cou tendu, comprennent et frémissent. On entend leurs respirations haleter à mesure que lourdement le convoi s’avance. Les mains se crispent convulsivement sur les carabines et les yeux suivent avidement le panache de fumée qui jaillit, en pulsations, avec ses rougeurs de météore.

Au ras du sol, luisent, fixes et mornes, les lanternes, comme les yeux de quelque monstrueuse bête de cauchemar.

La terre tremble et ses trépidations se répercutent à toutes les poitrines… le train arrive avec ses bruits multiples, ses fracas de métal, ses halètements de vapeur, ses roulements de tonnerre.

Et une pensée rapide, aiguë, lancinante, traverse tous les esprits : « Comme Joannès tarde !… et si la mine ratait !… »

Chacun croit que le convoi va passer et il n’en est pas un qui déjà n’eût enflammé la dynamite !…

Mais le chef a conservé tout son sang-froid. Son cœur ne bat pas plus vite, ses yeux voient juste et sa main ne tremble pas. Au moment précis où la loco-