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la terreur en macédoine

semble écarté, du moins pour l’instant ; et la plus élémentaire prudence veut qu’on marche posément et non pas en fuyards. Ah ! ce n’est plus ici comme de l’autre côté de la frontière. Point de roses, point de gens radieux, point de maisons fleuries, point de moissons déjà vertes couvrant la mosaïque des plaines !…

Partout des chardons rébarbatifs ou de tristes ajoncs ; partout des demeures en ruine, des murailles calcinées par l’incendie ; partout des champs dévastés où errent des malheureux en deuil pleurant leurs proches assassinés !

Les massacres ont été effroyables ! Une véritable orgie de sang, une frénésie d’extermination. Dans le seul vilayet de Prichtina, deux cents villages ont été brûlés, dix mille maisons détruites, seize mille personnes égorgées ! Soixante mille malheureux se sont trouvés sans abri et ont erré pendant l’hiver à la recherche d’un morceau de pain !

Le vilayet de Monastir et celui de Salonique n’ont pas moins souffert. On ne compte plus les bourgs anéantis et les cadavres qui pourrissent de tous côtés.

Cette partie de l’empire ottoman qui comprend la Macédoine est devenue un désert et un charnier !

C’est pire que la misère, pire que la ruine ! c’est l’agonie de tout un peuple laborieux et paisible, qui roule sous la botte du soldat turc, le brigand !

Trois cent mille hommes ont été mobilisés. Ils occupent cette malheureuse Macédoine et vivent dans les bourg et les villes, aux frais des habitants ! Il y a soixante-dix mille hommes dans le vilayet d’Andrinople, cent vingt mille dans celui de Salonique, cin-