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la terreur en macédoine

culent ce bloc de maçonnerie jusqu’alors inébranlable.

On ne s’entend plus ! impossible d’échanger une pensée, un geste même, au milieu de ce bruit et de cette fumée.

La situation est effroyable. Dans cinq minutes la petite forteresse ne sera plus qu’un monceau de décombres.

Encore un obus ! on ne les compte plus. Un mur est percé à jour. Un pan s’écroule avec fracas. Trois côtés restent seuls debout, et dans quel état !

« Ils tardent bien ! » s’écrie Michel au milieu du vacarme.

Joannès secoue douloureusement la tête.

« J’avais trop espéré, dit-il.

« Il est trop tôt… il faut encore du sang… le nôtre… de nouveaux martyrs pour amener ce grand mouvement d’indignation… précurseur de la liberté.

— Ils viendront ! » reprend Michel avec énergie.

Maintenant, ils peuvent à peine se masser dans une encoignure. Précaire et dernier refuge où la chute d’un seul obus peut les anéantir.

Nul n’est atteint grièvement. Mais tous ont reçu des éclats de pierre ou des fragments de fonte et ils saignent en abondance.

Droits et fiers, ils attendent le coup mortel ! À une seconde d’intervalle, arrivent, comme une trombe, deux obus qui pulvérisent la façade. La maison penche… penche à tomber… le plancher s’incline…

Se sentant glisser, les malheureux se cramponnent aux pierres branlantes…

Un coup ! encore un seul et c’est la fin !

Un cri vibrant jaillit de leurs lèvres. Suprême adieu