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la terreur en macédoine

Pendant ce bref répit, les assiégés ont remonté, sur leur terrasse, à force de bras, les échelles.

« Ça peut servir », dit Michel.

Soliman, qui semble cogner avec une joie sans pareille sur ses coreligionnaires, approuve et ajoute :

« Quand ça ne serait que pour les leur flanquer sur la tête !

— Tiens ! l’attaque changé de côté… c’est chez les voisins… « Oh ! les malheureux ! »

En un clin d’œil les portes sont enfoncées. L’intérieur est envahi.

Puis la symphonie atroce de hurlements, de cris déchirants, de râles d’agonie. C’est encore et toujours le massacre, la mutilation, les raffinements d’une férocité implacable et savante.

Trois hommes sont charcutés avec une brutalité que double encore la rage de l’échec récent.

Joannès gronde, les poings serrés :

« Mille tonnerres ! oh ! ne pouvoir secourir ces malheureux… assister impuissants à leur agonie !… »

Deux femmes sanglantes, échevelées, font irruption sur la terrasse. L’une tient dans ses bras un enfant. Grièvement blessée à la poitrine, elle aperçoit, en face, les intrépides combattants.

Un abîme, hélas ! les sépare. Une ruelle de cinq mètres… une coupure à pic entre les deux maisons !

D’un geste renfermant une ardente prière, elle leur tend son petit et sanglote, d’une voix éteinte :

« À l’aide !… à l’aide !… oh !… par pitié… »

L’autre fait le signe de la croix, de droite à gauche, selon le rite grec, et s’écrie :

« Nous sommes chrétiennes, frères !… au secours… au secours !… on nous tue !…,