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la terreur en macédoine

chandises jonchent le sol, les objets d’ameublement sont pulvérisés… C’est un pêle-mêle effroyable de cadavres sans forme, d’objets sans nom, de débris agglutinés de chair et de sang.

Les chrétiens sont poursuivis jusque dans les caves. Là, il y a du vin et des liqueurs fortes. Malgré la défense formelle de leur religion, ces fanatiques échauffés par la lutte et le carnage commencent à boire.

Marko, d’ailleurs, les y encourage.

« Allons, dit-il, buvez !… vous travaillez pour Allah… il vous pardonnera… buvez !… le vin des chrétiens est bon… il donne des forces…

« Buvez ! mes braves, et s’il y a péché je le prends à mon compte… allons, buvez !… »

Et ils engloutissent, avec l’avidité de gens qui en ignorent les effets, les liquides incendiaires. Désormais, rien ne peut plus arrêter leur frénésie. Non, rien que l’anéantissement de cette population inoffensive qui crie, implore et succombe torturée.

Depuis longtemps il fait grand jour et la tuerie est devenue générale. Maintenant on massacre dans presque toutes les maisons. Les gendarmes qui gardent les issues commencent à s’ennuyer de leur inaction. Ils voudraient bien participer à l’effroyable scène d’ivresse et de sang, mais la consigne est formelle.

Cependant quelques fuyards ont pu s’échapper par des issues dérobées. Ces petits passages étroits, comme en possèdent la plupart des demeures orientales, n’avaient pas été surveillés. Déjà les malheureux, portant quelques objets précieux, se croient sauvés.