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« Aux situations difficiles, il faut un homme : Je suis cet homme et je me dis votre serviteur,

« Marko-Bey, prince d’Albanie,      
« Gouverneur par intérim dePritchina
. »

Cette dépêche d’une bizarre et audacieuse impudence cause un moment d’émoi au vizir. Il sait très bien lire entre les lignes et deviner entre les mots. Il connaît le fort et le faible des provinces macédoniennes. Le fort, c’est l’Albanais, qui, dans la main d’un chef audacieux, peut mettre en échec les armées ottomanes… Le faible, c’est le Turc transplanté là-bas et enserré entre deux ennemis, le montagnard et le paysan.

Si le montagnard savait et pouvait s’allier au cultivateur, ce serait la fin de la domination turque…

Ce Marko qui dispose de forces pareilles est à ménager… Il a pris le titre de vali et ne paraît pas d’humeur à s’en dessaisir… Mieux vaut le lui conserver jusqu’à nouvel ordre. Du reste, il parle d’or et il semble posséder des théories financières très acceptables. On ne pouvait jamais tirer un sou de la Macédoine et voilà que, pour son début, il verse dix mille bourses en or ! Une somme considérable et qui n’est évidemment qu’un acompte.

En conséquence, Marko recevait dans la soirée le télégramme suivant :


« À Marko-Bey, prince d’Albanie, vali de Prichtina. Vos pouvoirs seront confirmés par un courrier spécial, après nomination officielle par Sa Majesté. Quoiqu’il arrive, vous répondrez de tout.

« Signé : Mourad, grand vizir. »