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la terreur en macédoine

— Tu mens !

— Une absence de mémoire n’est pas un mensonge. »

Marko réfléchit un moment. Il tiraille sa longue moustache fauve, sourit et dit :

« Nous allons voir. »

Il se baisse, empoigne le revers du dolman qui recouvre le faux zaptié, le déboutonne avec violence et tâtonne. Le vêtement est pourvu d’une poche intérieure fermée par une agrafe. Il arrache l’agrafe, introduit sa main dans la poche et en tire une grosse enveloppe cachetée de rouge.

Puis il ajoute, goguenard :

« Tu voulais me cacher ce papier !

— Je l’avais oublié !… Tout à l’heure, nous avons été assommés par la grêle des débris… puis, je viens de faire une chute… c’est à peine si je vois et si j’entends. »

Marko déchire l’enveloppe et lit à demi-voix :

« Le bey de Kossovo, notre ami très affectionné Marko, est invité, au reçu des présentes, à se rendre, sans retard, au vilayet de Prichtina. Il serait convenable que le bey Marko partît aussitôt et revînt au vilayet accompagné du porteur.

« Signé : Omer-Pacha, vali de Prichtina. »

Pas de date, pas d’autre indication, pas la moindre formule protocolaire, mais, au-dessous de la signature du gouverneur général, s’étale en belle place le sceau impérial. L’emblème redouté devant lequel s’inclinent les plus orgueilleux et les plus forts.

Marko éclate de son rire aigu et ajoute :

« C’était bel et bien un guet-apens !

« Je pouvais partir d’ici avec une faible escorte,