tous les feux du monde dans mon désir d’articuler
un cri profond comme ma pensée, plein d’elle et de
son mystère. Le songe quel qu’il soit, veut être tout.
Il veut assimiler toutes les choses par la ressemblance
qu’elles n’ont qu’un instant avec lui. On
dirait qu’il lui faut tout un univers pour retourner
à sa source, mille pays et tous leurs fruits, autant de
formes qu’il y a d’étoiles pour que chacun n’y connaisse
que son amour et qu’il sente le néant de tant
d’objets qui le lui ont conçu.
À travers les hautes herbes de la ville, je fonçais de
lumière en lumière, vers le songe qui est la vie intérieure
de mon cœur. Aussi vrai que je suis un
homme, ce songe que je dis est femme. Perdu pour
moi il m’éclaire le monde où il est perdu. Il dresse
tout ce que j’aime contre tout ce que je suis.
Je me secouais, je me répétais : « Je vais voir l’un
ou l’autre de mes malades, je suis un médecin comme
il y en a tant. Claire comme est ma vie je pourrais
la prendre pour celle de quelqu’un plus. Et je ne
vois pas pourquoi je m’interroge sur elle quand j’y
laisse s’employer mes heures en une suite d’actions
où je ne me donne pas la peine de pénétrer… »
Mais je n’étais plus si insouciant puisque je savais
que je l’avais été. Au fond, je sentais bien que cette
liberté d’esprit était justement ce qui me faisait défaut ;
et que c’était contre elle que mon amour s’était
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