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légèrement persifleur, celle que vous nommiez Iris, vous avez les yeux bien assez vifs pour savoir la reconnaître au milieu des femmes qui font leur chemin ; vous avez la langue assez bien pendue pour lui apprendre où vous l’avez dénichée et lui soutenir qu’il ne lui va pas bien de le prendre de haut quand tout ce qu’elle vous éclaire, elle l’a tiré de vous.
Mon interlocuteur rougit de m’entendre traiter son Iris en personne de connaissance. Il y avait à son gré un homme de trop dans l’idée que je me faisais d’elle. Aussi reprit-il sa thèse à rebours comme s’il souhaitait que son humeur chimérique n’influençât désormais que mes réflexions ; et, me montrant pour ainsi dire son âme à contre jour, il me décrivit une de ses amies ; il accapara mon imagination par une ravissante peinture où ma pensée était seule à faire la part d’Iris ; ce qui revenait à ne plus identifier en elle que la fatalité qu’il y a dans l’acte d’aimer.


« Une robe couleur de jour » disait-il en finissant, « une robe couleur de jour sur les épaules de cette femme transparente et le poids de ses bijoux dans ses cheveux de nuit ; et ses grands yeux de charbonnier dans son visage de reine ; et puis, ce qui me la fait voir partout avec ses dents qui rayonnent, le lis des sables de son rire, ses mains bercées sur les roses du vent. Et puis, et puis,