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Ceux qui ont fait cette malheureuse et glorieuse campagne, conviendront qu’il fallait, comme disait l’Empereur, être de fer pour avoir résisté à tant de maux et de misères, et que c’est la plus grande épreuve à laquelle l’homme puisse être exposé.

Si j’ai pu oublier quelque chose, comme date ou noms d’endroits, ce que je ne pense pas, il est de mon devoir de dire que je n’ai rien ajouté.

Plusieurs témoins de ce que j’écris, qui étaient dans le même régiment que moi, et quelques-uns dans la même compagnie, et qui ont fait cette mémorable campagne, vivent encore. Je citerai en particulier :

MM. Serraris, grenadier vélite, actuellement maréchal de camp au service du roi de Hollande, natif de Saint-Nicolas en Brabant. Il était lieutenant dans la même compagnie où j’étais alors sergent[1].

Rossi, fourrier dans la même compagnie, natif de Montauban, et que j’eus le bonheur de rencontrer à Brest, en 1830. Il y avait seize ans que nous ne nous étions vus.

Vachin[2], alors lieutenant dans le même bataillon, habitant actuellement Anzin (Nord). Lorsque je le rencontrai, il y avait vingt ans que nous ne nous étions vus.

Leboude, sergent-major alors, à présent lieutenant général en Belgique, était aussi du même bataillon, ainsi que Grangier, sergent, qui était du Puy-de-Dôme, en Auvergne. Celui-la était mon ami intime. Dans plus d’une circonstance il me sauva la vie ; il avait une faible santé, mais un courage à toute épreuve. Il est mort du choléra en 1832.

Pierson, aussi sergent vélite, actuellement capitaine à l’état-major de place à Angers[3]. Il était très laid, mais bon enfant, comme tous les vélites. Il n’y avait pas de figure

  1. Ancien camarade de Bourgogne aux vélites de la Garde où il était aussi entré en 1806, le lieutenant Serraris fit toutes les campagnes de l’Empire, reçut la croix des mains de l’Empereur à la revue du Kremlin (v. page 46), et quitta le service en 1814, après avoir été promu chef de bataillon et officier de la Légion d’honneur. Il est mort en 1855, lieutenant général au service des Pays-Bas. Il a laissé, nous écrit son fils, un journal de ses campagnes dont la partie relative à celle de Russie confirme entièrement l’exactitude des récits de Bourgogne.
  2. Mort à Valenciennes en 1856. (Note de l’auteur.)
  3. C’est-à-dire en 1835, à l’époque où je mettais mes Mémoires en ordre. (Note de l’auteur.)