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d’autres qui partaient sur des traîneaux que l’on venait de leur procurer.

Nous descendîmes et nous entrâmes. Nous demandâmes du vin, car un vélite chasseur et un ancien venaient de nous dire qu’il y en avait, et « du soigné ». Ils paraissaient même en avoir bu copieusement.

Le vieux comme le jeune étaient d’une gaieté folle, chose qui arrivait presque à tous ceux qui, comme nous, avaient eu tant de misères et de privations. La plus petite boisson vous portait à la tête. Le vieux nous demanda si nous avions rencontré le régiment de grenadiers hollandais, faisant partie de la Garde impériale. Nous lui répondîmes que non : « Il a passé près de vous, dit le vélite, et vous ne l’avez pas aperçu ? Ce grand traîneau qui vous a dépassé, eh bien, c’était tout le régiment des grenadiers hollandais ! Ils étaient sept ! »

Le maître de poste annonça à nos deux chasseurs qu’il y avait un traîneau à leur disposition et que, pour trois thalers (quinze francs), il les conduirait à trois lieues d’Elbing. Nous nous disposâmes à partir avec eux, puisqu’ils avaient un conducteur. Cinq minutes après, nous étions en route.

Grangier et moi nous trouvâmes fortement indisposés et rendîmes tout ce que nous avions pris depuis la veille. Cette indisposition venait de ce que notre estomac n’était plus habitué à prendre de fortes nourritures, il aurait fallu nous y habituer peu à peu ; c’est ce que nous nous promîmes de faire. Arrivés au village, nous prîmes chacun un verre de genièvre de Dantzig. Nous continuâmes à marcher jusqu’au moment où nous arrivâmes dans le village où nous devions loger. Il faisait nuit ; nous nous présentâmes chez le bourgmestre afin d’avoir un billet de logement, mais on nous le refusa brutalement en nous disant que nous n’avions qu’à coucher dans la rue. Nous voulûmes faire des observations ; on nous ferma la porte au nez. Nous nous présentâmes dans plusieurs auberges où, en payant, nous demandâmes à loger, mais partout nous eûmes la même réception.

Nous décidâmes, les chasseurs et nous, que nous continuerions à marcher ensemble, qu’ils profiteraient de notre traîneau et, comme il n’était pas assez grand pour nous