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— « Cache-toi, » dit Ely, « je vais savoir… » Elle jeta un peignoir sur ses épaules et rabattit sur le jeune homme un des rideaux de l’alcôve ; puis, la lampe à la main, elle marcha vers la croisée, elle l’ouvrit, et d’une voix forte elle cria : « Qui est là ? Que se passe-t-il ? »

— « Ne vous inquiétez pas, ma chère amie, » répondit une voix, celle de l’archiduc, dont l’affreuse ironie la fit frissonner ; « c’est un voleur qui voulait s’introduire dans la villa… Il doit avoir deux ou trois balles dans le corps. Nous sommes en train de le chercher. Soyez tranquille. Il ne reviendra pas. Laubach a tiré à bout portant… »

Ely referma la fenêtre. Quand elle se retourna elle vit que Pierre s’était déjà plus qu’à moitié vêtu. Il était très pâle et ses mains tremblaient : — « Tu ne vas pas t’en aller ! » lui dit-elle. « Le jardin est plein de monde. »

— « Il faut que je parte, » répondit-il. « C’esr sur Olivier qu’ils ont tiré… »

— « Sur lui ? » dit-elle, « mais tu es fou ! … »

— « C’est sur lui, » répéta-t-il avec une énergie singulière, « sur lui qu’ils ont pris pour moi… Il m’a vu sortir. Il m’a suivi. C’est lui dont j’ai entendu les pas… »

— « Non, je ne veux pas que tu partes, » dit-elle, et elle se mit en travers de la porte : « Je t’en conjure, attends. Ce n’est pas lui qui était là, ce ne peut pas être lui… Ils te tueront. Je t’en supplie, mon amour, ne sors pas, ne me quitte pas… »

Il avait achevé de s’habiller. Il l’écarta presque