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de miss Marsh, depuis Antibes jusqu’à la Napoule, les mêmes « how lovely ! … how enchantingl… how fascinatin ! l… » qu’elles eussent prononcés devant un Raphaël ou une robe de Worth, une partie de polo ou un gymnaste à la mode. Sans doute, le compère, avec son fin sourire, possédait aussi des talents de diplomate qui pouvaient le rendre utile dans quelque intrigue secrètement conduite, car le prudent Corancez ne prenait jamais d’autre voiture, surtout quand il avait, comme ce matin, un rendez-vous avec la marquise Andriana. Il devait la retrouver pour cinq minutes dans le jardin d’un hôtel où elle faisait une visite. Sa voiture, à elle, attendrait devant une des portes, l’équipage de l’Aîné devant une autre. Aussi aucune réponse ne pouvait être plus agréable au fiancé clandestin que celle de Pierre :

— « Merci, j’aime mieux marcher… »

— « Alors, adieu, » fit Corancez en s’asseyant dans la voiture. Et, parodiant un vers célèbre :

— « Et à bientôt, Seigneur, où vous savez, avec qui vous savez pour ce que vous savez ! … »

La voiture tourna l’angle de la rue d’Amibes, et s’éloigna d’une vitesse folle. Hautefeuille était enfin seul ! L’idée qui se formulait dans sa pensée avec une précision affreuse depuis que miss Florence Marsh lui avait dit ces simples mots : « Votre flirt, Mme de Carlsberg, » cette incroyable, cette indiscutable idée, il pouvait enfin la regarder en face : — « Ils savent tous trois que je l’aime, la