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Son transparent visage était demeuré clair et candide, pour donner, des faits et des gestes de l’excentrique neveu de Bob Campbell, cette explication toute professionnelle. Evidemment, Hilda était de bonne foi. N’avait-elle donc jamais deviné que l’affection de ce taciturne camarade de son enfance s’était transformée avec l’épanouissement de sa beauté ? Le personnage était si taciturne, en effet, une si impassible froideur enveloppait tout son être, que Jules n’arrivait pas à se rendre compte, lui non plus, des vrais sentiments que ce garçon portait à la fille de son oncle. En revanche, comment eût-il pu mettre en doute l’aversion de l’écuyer pour lui ? Chaque jour, elle se dissimulait un peu moins… Jules arrivait-il le matin ? Il voyait les hautes épaules de Corbin disparaître dans les profondeurs d’un box, et il ne pouvait pas s’illusionner : ce soudain intérêt autour de la mangeoire ou des paturons de l’hôte de ce box n’était qu’un subterfuge pour n’avoir pas à le saluer. C’était la moindre insolence du cousin jaloux. À peine sa maigre et osseuse figure s’inclinait-elle quand les circonstances ne lui permettaient pas de faire autrement, si, par exemple, Jules et lui se rencontraient, face à face, dans le bureau de Bob Campbell. Très souvent, Maligny venait y passer une demi-heure, à la fin de l’après-midi, avec l’espérance d’entrevoir de nouveau le sourire ami de Hilda.

Le demi-Slave déployait, à inventer des prétextes pour justifier ces réapparitions rue de Pomereu, une Imaginative toujours en éveil. Tantôt il s’agissait d’un fructueux marché à faire conclure au gros Bob ; — tantôt il voulait de lui un tuyau sur une prochaine course ; — une autre fois, il avait à le consulter sur un achat de porto ; et il apportait avec lui l’échantillon… — Tantôt… Mais à quoi bon énumérer des contes sans intérêt dont le jeune homme aurait pu