Page:Bourget - L’Écuyere, 1921.djvu/108

Cette page n’a pas encore été corrigée

sur un énorme cheval, et suivie de Norah et de Birman, les chiens, réels ceux-là, qui ne le quittaient guère. Des aboiements féroces jaillirent soudain de la gueule des skyes, — ces manchons roulants sur de courtes pattes torses — au seul aspect de l’étranger, et le « How do you do ? » de leur maître ressemblait fort, lui aussi, à un grognement. Ce grand long corps était habité par un de ces esprits presque animalement observateurs, comme en possèdent les gens du peuple, très voisins de l’instinct et qui vivent toujours avec les bêtes. Quand l’amour y ajoute sa lucidité, ces intelligences frustes ne peuvent guère être trompées. Corbin n’avait à son service, pour pénétrer les véritables intentions de Maligny, d’autres renseignements que ceux qui avaient d’abord ému sa sympathie en faveur du courageux défenseur de sa cousine. On se rappelle comme il l’avait accueilli. Ce premier éveil de reconnaissance subsistait toujours. Une défiance s’y mêlait déjà. Cette lutte entre deux sentiments aussi contradictoires donnait la plus comique expression de malaise à ce masque, flegmatique et rogue, couleur de cuir tanné, avec le bourrelet rouge de sa cicatrice aperçu sous la visière de la casquette. Ses yeux dévisageaient le nouvel ami de sa chère Hilda du même regard que les deux bassets, lesquels ne savaient évidemment pas s’ils devaient mordre les mollets de l’intrus ou lui lécher la main… Une fois de plus, la grâce innée de Jules fut la plus forte. Au salut bourru de Jack, lancé du haut de sa selle, il répondit par le plus cordial des :

« Je vais très bien, monsieur Corbin, » et il ajouta : « D’autant mieux que j’ai l’idée que vous m’amenez là, précisément, la bête que je cherche. »

— « Trop verte pour un amateur… » répondit brutalement l’écuyer.

— « Je vous ai vu monter, monsieur Corbin, » répliqua