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craindre de le faire ; car le danger de la vanité et de la présomption est toujours plus grand que le fruit de ces éducations prématurées qui font tant de bruit. »

« Laissez jouer un enfant, et mêlez l’instruction avec le jeu ; que la sagesse ne se montre à lui que par intervalle et avec un visage riant ; gardez-vous de le fatiguer par une exactitude indiscrète. Si l’enfant se fait une idée triste et sombre de la vertu, si la liberté et le dérèglement se présentent à lui sous une figure agréable, tout est perdu, vous travaillez en vain.

« Remarquez un grand défaut des éducations ordinaires ; on met tout le plaisir d’un côté et tout l’ennui de l’autre : tout l’ennui dans l’étude, tout le plaisir dans les divertissements. Que peut faire un enfant, sinon supporter impatiemment cette règle et courir ardemment après les jeux ? »

Voici, quant au divertissement lui-même, une précieuse observation : « Quand on ne s’est encore gâté par aucun grand divertissement, et qu’on n’a fait naître en soi aucune passion ardente, on trouve aisément la joie ; la santé et l’innocence en sont les vraies sources ; mais les gens qui ont eu le malheur de s’accoutumer aux plaisirs violents perdent le goût des plaisirs modérés, et s’ennuient toujours dans une recherche inquiète de la joie.

Les plaisirs simples sont moins vifs et moins sensibles, il est vrai : les autres enlèvent l’âme en remuant les ressorts des passions. Mais les plaisirs simples sont d’un meilleur usage ; ils donnent une joie égale et durable sans aucune suite maligne : ils sont toujours bienfaisants ; au lieu que les autres plaisirs sont comme les