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madame, rien n’est plus injuste, et je vous assure que je ne lis pas. »

On raconte que, lors de l’exécution du régicide Damiens, condamné à être écartelé, c’est-à-dire tiré à quatre chevaux, La Condamine, afin que rien ne lui échappât des détails du supplice, s’était mêlé aux valets du bourreau. Comme les archers voulaient le faire retirer, l’exécuteur le prit sous sa protection en disant, et paraît-il, sans aucune intention ironique :

— Laissez monsieur, c’est un amateur.

Supposé vraies ces anecdotes, on peut, dans une certaine mesure, excuser La Condamine en disant avec Delille : « On a prétendu que cette curiosité, précieuse dans le savant, ressemblait quelquefois à l’indiscrétion dans l’homme de société ; mais ces petits torts, qu’on remarque dans un homme ordinaire, s’éclipsent dans un homme célèbre, par la considération des avantages que retire la société de ses défauts mêmes ; et c’est peut-être le louer encore que d’avouer qu’il porta cette passion à l’excès. »

Après la campagne dont nous avons parlé, La Condamine voyant la paix signée se dégoûta de la carrière militaire qui ne répondait plus à son besoin d’activité, et donnant sa démission, il entra comme adjoint chimiste à l’Académie des sciences. Fût-ce en cette qualité qu’il obtint de s’embarquer sur l’escadre de Duguay-Trouin, avec laquelle il parcourut les côtes de l’Asie et de l’Afrique ? Il visita la Troade en particulier et fit un séjour de plusieurs mois à Constantinople.