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malgré tous ses succès, il avait beaucoup plus à se défendre du découragement que de la présomption. »

En sorte que rien n’était plus remarquable, comme l’écrit Villenave, au milieu de tant de gloire que tant d’humilité[1].

Aussi n’aspirait-il qu’à se faire oublier et il lui tardait de pouvoir s’ensevelir dans la solitude pour se préparer à la mort. Il en fit la demande au Père provincial « qui ne put consentir à priver la Société de celui qui en faisait le principal ornement. » Bourdaloue, pour cette fois se résigna ; mais l’année suivante, il écrivit au général une longue lettre pour le supplier de lui accorder ce qu’il n’avait pu obtenir du Père provincial.

« Il y a cinquante-deux ans dit-il, que je vis dans la Compagnie, non pour moi mais pour les autres ; du moins plus pour les autres que pour moi. Mille affaires me détournent et m’empêchent de travailler, autant que je le voudrais, à ma perfection qui néanmoins est la seule chose nécessaire. Je souhaite de me retirer et de mener désormais une vie plus tranquille : je dis plus tranquille afin qu’elle soit plus régulière et plus sainte. Je sens que mon corps s’affaiblit et tend vers sa fin. J’ai achevé ma course et plût à Dieu que je pusse ajouter : J’ai été fidèle ! Je suis dans un âge où je ne me trouve plus guère en état de prêcher. Qu’il me soit permis, je vous en conjure, d’employer uniquement pour Dieu et pour moi-même ce qui me reste de vie, et de me disposer par là à mourir en religieux. La Flèche, ou quelque autre maison qu’il plaira aux

  1. Notice sur Bourdaloue. Édition de 1812. 16 volumes in-8o.