Page:Bouniol - Les rues de Paris, 1.djvu/133

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un attachement fidèle, qu’une amitié sensible et cordiale. Supposons même cette vive amitié : que fera-t-elle ? où peut-elle aboutir ? Elle cause aux deux époux des délicatesses, des sensibilités, des alarmes. Mais voici où je les attends : enfin, il faudra que l’un soit presque inconsolable à la mort de l’autre ; et il n’y a point dans l’humanité de plus cruelles douleurs que celles qui sont préparées par le meilleur mariage du monde.

Joignez à ces tribulations celle des enfants, ou indignes et dénaturés, ou aimables mais insensibles à l’amitié ; ou pleins de bonnes et de mauvaises qualités, dont le mélange fait le supplice des parents ; ou enfin heureusement nés et propres à déchirer le cœur d’un père et d’une mère qui dans leur vieillesse voient, par la mort prématurée de cet enfant, éteindre toutes leurs espérances. Ajouterai-je encore toutes les traverses qu’on souffre dans la vie par les voisins, par les ennemis, par les amis même, les jalousies, les artifices, les calomnies, les procès, les pertes de biens, les embarras des créanciers ! Est-ce vivre ? Ô affreuses tribulations, qu’il est doux de vous voir de loin dans la solitude ![1] »

Voilà certes qui doit consoler un peu le célibataire contristé de son isolement, et qui ne semble pas fait pour encourager à l’hymen ! Mais le grand moraliste chrétien, s’il donne la préférence à la vie la plus parfaite, ne dissimule pas que l’état religieux, lui aussi, a ses épreuves, ses peines, ses tentations contre lesquelles on ne saurait être trop en garde. Ô la page étonnante que celle-ci choisie entre plusieurs autres :

  1. Sur les obligations de l’état religieux.