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ville inconnue, qu'on place en Arabie, d'où son corps aurait été transporté à Édesse. Quelques Portugais ont prétendu avoir retrouvé les restes de ce saint à Méliapour dans le Carnate, ville qu'ils ont pour ce motif appelée San-Thomé, mais rien ne justifie cette prétention. On fête S. Thomas le 21 déc.

THOMAS (S.) d'Aquin, célèbre théologien, né en 1227 au château de Rocca-Secca, dans le roy. de Naples, près de l'abbaye de Mont-Cassin, de la famille illustre des comtes d'Aquino, entra dans l'ordre des Dominicains, malgré l'opposition de sa famille, afin de satisfaire son goût pour l'étude et la piété; alla étudier sous Albert le Grand à Cologne, suivit ce maître à Paris, prit dans l'université de cette ville le bonnet de docteur (1255), s'y livra avec grand succès à la prédication et à l'enseignement, et s'attira l'estime de S. Louis, qui l'admit souvent à sa table; fut envoyé par son Ordre à Naples (1272) pour y enseigner la théologie, et mourut deux ans après, à l'abbaye de Fosse-Neuve, près de Frosinone, pendant qu'il se rendait au concile général de Lyon. Les papes Innocent IV, Clément IV, Grégoire X lui avaient offert les dignités de l'Église; il refusa tout et se contenta toujours dans son ordre du titre de definitor, équivalant à peu près à celui de professeur. S. Thomas fut l'homme le plus savant et le plus profond théologien de son temps, ce qui lui valut les surnoms de Docteur universel, Docteur angélique, Ange de l'école, et ce qui le fit mettre par le pape Pie V au rang des Docteurs de l'Église. Non moins remarquable par sa piété, il mérita d'être canonisé. On l'h. les 7 mars et 18 juill. Ses Œuvres ont été publiées à Rome en 18 vol. in-fol., 1570-71, à Paris, en 23 vol. in-fol., 1636-41, à Venise, 20 vol. in-4, 1745, à Parme, 24 vol. in-4, 1857 et ann. suiv., et réimpr. par l'abbé Migne en 4 vol. in-8 à 2 col. On y trouve, avec des traités dogmatiques de théologie, des Comment. sur Aristote, — sur l'Écriture, — sur le Maître des sentences (P. Lombard), des sermons, des écrits de controverse et même des poésies (surtout des Hymnes : Lauda, Sion; Adorate; Pange, lingua; Verbum supernum, etc.). Ses ouvrages principaux sont une Somme de la foi catholique contre les Gentils, et une Somme de théologie, longtemps classique : il y discute et résoud, sous la forme syllogistique, les principales questions de la théologie, de la philosophie et de la morale. Ce grand ouvrage a été trad.en franç. au dernier siècle par Marandé et Hauteville, et de nos jours, avec une louable émulation, par l'abbé Drioux (1852 et ann. suiv.), par l'abbé Écalle (1854), et par F. Lâchât (1856-61). Sans pouvoir exposer ici la doctrine théologique de S. Thomas, dont plusieurs points, surtout en ce qui concerne la grâce, ont donné lieu à des interprétations diverses, il suffira de dire qu'en Métaphysique, il était idéaliste; qu'en Morale, il admettait une distinction absolue entre le bien et le mal, et fondait le bien sur la nature de Dieu et non sur sa volonté arbitraire; enfin qu'il conciliait la liberté de l'homme avec la toute-puissance de Dieu, l'existence du mal avec sa bonté. Il eut pour adversaire Duns Scot, et l’École se partagea dès lors en deux sectes, les Thomistes et les Scotistes. Parmi les ouvrages écrits sur S. Thomas, on remarque la Summa philosophica, d'après S. Thomas, par Allemani, Paris, 1640; les Dissertationes de gestis et scriptis S. Thomæ, de Bern. de Rubeis, Venise, 1730; un Mém. sur S. Thomas, de L. Montat, 1847, et surtout la Philosophie de S. Thomas, de M. Ch. Jourdain, 1856, ouvrage couronné par l'Acad. des sciences morales. M. Bareille a écrit sa Vie, 1846.

THOMAS DE CATIMPRÉ, Thomas Catimpratensis, légendaire belge (1201-1270), d'abord moine augustin à l'abbaye de Catimpré (près de Cambray), puis dominicain, enseigna la théologie à Louvain, prêcha en Belgique, en France, en Allemagne. On a de lui plusieurs Vies de Saints et de Saintes (dans les Acta Sanctorum des Bollandistes), des poésies (en latin), et un livre de morale ascétique, Bonum universale de Apibus (publié par Colvener, Douai, 1597), où l'auteur, à l'exemple de l'abeille, extrait de la vie et des écrits de plusieurs saints personnages de sages préceptes qu'il adresse aux supérieurs et aux inférieurs.

THOMAS MAGISTER, moine grec du XIVe s., connu aussi sous le nom de Théodule, est auteur d'un recueil par ordre alphabétique des Élégances attiques, écrit en 1310, publié pour la 1re fois à Rome en 1517, et édité de nouveau en 1832, à Halle, par Fr. Ritschl, et à Leipsick par C. Jacobitz, 1833. On le trouve d'ordinaire avec Phrynichus Arrhabius.

THOMAS DE VILLENEUVE (S.), né vers 1487 à Fuenlana (diocèse de Léon), m. en 1555, professa d'abord aux universités d'Alcala et de Salamanque, entra en 1520 dans la congrégation des Augustins, se voua dès lors à la prédication et à la direction des âmes, fut promu malgré lui à l'archevêché de Valence, opéra dans son diocèse d'importantes réformes, et distribua aux pauvres la presque totalité des revenus de son siége. On le fête le 18 septembre.

THOMAS (Ant. Léonard), littérateur, né à Clermont-Ferrand en 1732, m. en 1785, travailla d'abord chez un procureur, puis fut professeur au collège de Beauvais (à Paris), commença en 1759 à se faire connaître par son poëme de Jumonville (1759), remporta cinq fois le prix d'éloquence à l'Académie française, en composant les Éloges du maréchal de Saxe (1759), de d'Aguesseau (1760), de Duguay Trouin (1761), de Sully (1763), de Descartes (1765), obtint aussi un prix de poésie (par son Ode sur le Temps, 1762), et fut admis à l'Académie française en 1767. Depuis cette époque, il publia encore l’Éloge de Marc-Aurèle (1770), qui fut fort peu goûté; un Essai sur les femmes (1772); enfin un Essai sur les éloges (1773), qu'on regarde comme son chef-d’œuvre. Ayant quitté de bonne heure la carrière de l'enseignement, il devint secrétaire du duc de Praslin, ministre des affaires étrangères, puis fut nommé secrétaire-interprète des cantons suisses, sinécure qui lui permit de se livrer à son goût pour les lettres. Il laissa en mourant plusieurs écrits, parmi lesquels on distingue, outre ses Lettres, la Pétréïde, poëme en l'honneur du czar Pierre le Grand, qui devait avoir 12 chants, mais dont 6 seulement étaient achevés. On ne peut refuser à cet écrivain de l'éloquence et un grand talent de style, mais on lui reproche de l'emphase et de la monotonie. Thomas était un modèle de vertus : il donna dans les circonstances difficiles les preuves d'une belle âme ; au risque de perdre la protection du duc de Praslin, il refusa d'entrer à l'Académie au détriment de Marmontel ; quoique fort gêné lui-même, il ouvrit souvent sa bourse aux écrivains malheureux. Il eut pour amis Marmontel, Delille, Chamfort, Ducis. Ses Œuvres ont été publiées par lui-même en 1773, 4 vol. in-8; et rééditées par Desessarts, 1802, 7 vol. in-8; par Belin, 1819, 2 vol. in-8 (édition compacte), et par St-Surin, 1825, 6 vol. in-8, avec une Notice.

THOMAS A KEMPIS, BECKET, MORUS. V. I. KEMPIS, etc.

THOMAS DE SAVOIE. V. SAVOIE et CARIGNAN (le pr. de).

THOMAS (CHRÉTIENS DE ST-). V. CHRÉTIENS.

THOMASIUS (Jacq.), philosophe, né à Leipsick en 1622, m. en 1684, enseigna pendant 40 ans la philosophie et l'éloquence à Leipsick, et compta Leibnitz au nombre de ses élèves. On a de lui : Origines historiæ philosophicæ et ecclesiasticæ (1665), De plagio litterario (1678), Philosophia practica tabulis comprehensa (1702), Hist. Atheismi (1713), et une foule de dissertations savantes. — Son fils Chrétien Th., savant jurisconsulte, né à Leipsick en 1655, m. en 1728, fut avocat, puis professeur de droit à Leipsick, choqua le clergé de cette ville par sa hardiesse et fut banni, se rendit à Halle, où il obtint la chaire de jurisprudence (1694), puis fut placé à la tête de l'université de cette ville. Il introduisit la langue vulgaire dans l'enseignement du droit (1687). On a de lui une foule d'ouvrages de jurisprudence, de droit naturel et de morale, parmi lesquels on re-