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Philibert, duc de 1553 à 1580, fils du précéd., fut un des meilleurs généraux de Charles-Quint. V. EMMANUEL-PHILIBERT. — Charles-Emmanuel, le Grand, fils du préc., duc de 1580 à 1630. Profitant des troubles de la France, il s'empara du marquisat de Saluces, et se fit nommer par les Ligueurs comte de Provence en 1590. Henri IV, pour se venger de lui, envahit la Savoie et le Piémont, et se fit céder, par le traité de Lyon (1601), le Bugey, le Valromey et le pays de Gex. D'une ambition sans bornes, Charles-Emmanuel eut des prétentions sur le trône impérial après la mort de l'empereur Mathias, puis sur le royaume de Chypre et sur la principauté de Macédoine. Il mourut de chagrin parce qu'il ne pouvait accomplir ses projets. — Victor Amé ou Amédée I, fils du précéd., duc de 1630 à 1637 (V. VICTOR-AMÉDÉE). — Ce prince laissa 2 fils, François-Hyacinthe, âgé de 5 ans, qui fut mis sous la tutelle de sa mère, Christine de France, fille de Henri IV et sœur de Louis XIII, mais qui mourut dès l'année suivante; et Charles-Emmanuel III, né en 1634, qui fut proclamé duc en 1638 et qui fut également placé sous la tutelle de sa mère. Il ne prit le gouvernement de ses États qu'en 1648 et régna jusqu'en 1675. Reconnaissant envers les Français, qui l'avaient protégé pendant sa minorité, Charles-Emmanuel resta fidèle a leur alliance et leur dut un règne paisible. Il protégea le commerce et les arts, et fit construire le palais royal de Turin, ainsi que le Chemin de la Grotte sur la montagne des Échelles, pour faciliter le transport des marchandises de France en Italie. — Le fils de ce dernier, Victor-Amédée II, d'abord duc de Savoie, reçut en 1713 le titre de roi de Sicile et en 1720 celui de roi de Sardaigne. — Pour ce prince et pour ses successeurs, V. le nom sous lequel ils ont régné. Pour les autres princes célèbres de cette maison, V. NEMOURS, EUGÈNE, CARIGNAN, etc. — L’Hist. de la Savoie a été écrite par Cl. Genoux, 1854, et par Le Gallais, 1860. La princesse de Belgiojoso a donné l’Hist. de la maison de Savoie, 1860.

SAVONAROLE (Frère Jérôme), célèbre prédicateur dominicain, né à Ferrare en 1452, était le petit-fils de J. Michel Savonarole, médecin distingué de Ferrare. Nommé en 1488 prieur du couvent de St-Maro à Florence, il se distingua dans la chaire par son éloquence, mais il se livra bientôt à de violentes déclamations contre le clergé et le St-Siége, excita le peuple à se révolter contre les Médicis, et, prétendant avoir reçu le don de prophétie, prédit avec assurance une révolution prochaine. Peu après en effet (1494), Charles VIII étant venu en Italie, les Florentins profitèrent de la présence de ce prince pour recouvrer leur liberté. Savonarole, devenu l'idole du peuple, fut le véritable chef de la nouvelle république. Il se soutint pendant trois ans, et fit mettre à mort plusieurs citoyens qui avaient conspiré pour le rétablissement des Médicis ; mais, attaqué par les partisans de cette puissante maison, accusé d'hérésie par les religieux franciscains pour avoir soutenu des propositions suspectes, anathématisé par le pape Alexandre VI, dont il avait signalé les désordres, enfin privé de l'appui de Charles VIII, qui avait été forcé de retourner précipitamment en France, il perdit tout crédit, fut conduit en prison par ordre de la seigneurie qui administrait Florence, appliqué à la question, condamné comme hérétique et périt sur le bûcher le 23 mai 1498. Savonarole n'était pas moins remarquable par son exaltation que par son éloquence : il eut des visions, se crut inspiré et fit plusieurs prédictions dont quelques-unes parurent extraordinaires, mais que l'on a beaucoup exagérées. Poussant le zèle religieux jusqu'au fanatisme, Savonarole fit brûler les écrits de Dante, de Boccace et de Pétrarque. Il a laissé plusieurs ouvrages ascétiques ou apologétiques : le Triomphe de la croix, 1492 (en latin) : c'est une démonstration de la vérité de la religion catholique ; Du gouvernement de Florence, violente philippique contre la tyrannie ; Abrégé des révélations, histoire de ses visions ; Traité de la vérité prophétique. Une édition de ses Œuvres a été publiée à Lyon, 1633-40. 6 v. in-8o. On doit à M. Perrens une savante étude sur Savonarole, sa vie, ses prédications, ses écrits, Paris, 1853 et 1856.

SAVONE, Savo ou Sabata, v. murée de l'Italie septentr., dans les anc. États sardes (Gênes), ch.-l. d'intendance, sur le golfe de Gênes, à l'embouch. de l'Egabona, à 38 k. S. O. de Gênes ; 20 000 h. Évêché, trib. de commerce, école navale, musée d'histoire naturelle. Port, citadelle, arsenal. Fabriques d'armes, soieries, vitriol, faïence, savon (c'est à Savone que le savon fut inventé). Patrie du poëte Chiabrera ; le pape Jules II naquit auprès. — Cette ville, fort ancienne, appartenait à la Ligurie. Elle eut des évêques dès le VIIe, et devint bientôt florissante par son commerce. Les Génois, qui en étalent jaloux, s'en emparèrent et détruisirent son port en 1525. Les Anglais la bombardèrent en 1745 ; le roi de Sardaigne la prit aux Génois en 1746. Les Français s'en emparèrent en 1809 et en firent le ch.-l. du dép. de Montenotte. Napoléon y retint Pie VII prisonnier de 1809 a 1812. — La prov. de Savone, dans la division de Gênes, a 52 kil. sur 30, et 79 000 h. Elle est traversée par les Apennins.

SAVONNERIE (la), anc. manufacture royale de tapis, fut créée au Louvre en 1604, et transférée en 1631 à Chaillot, dans une maison qui fut appelée de là La Savonnerie. Réorganisée par Colbert, elle fut plus tard réunie à la manufacture des Gobelins.

SAX (Christophe), Saxius, savant compilateur et biographe, né en 1714 à Eppendorf en Saxe, m. en 1806, fut professeur d'histoire et d'antiquités, puis recteur à l'université d'Utrecht, et publia plusieurs savants ouvrages, entre autres l’Onomasticon litterarium (d'abord en 1 vol. in-8, 1759, porté depuis à 8 vol., Utrecht, 1775-1803), vaste répertoire d'indications littéraires et de sources à consulter sur les personnes, depuis les premiers temps jusqu'en 1796. Il a rédigé lui-même un abrégé des deux premiers volumes (Onomastici litterarii eptiome), Utrecht, 1792.

SAXE, Sachsen en allemand, nom commun à divers États ou pays de l'Allemagne, tant anciens que modernes, placés entre l'Ems et l'Oder, le bassin du Danube et la Baltique. Nous distinguerons d'abord ces divers États, puis nous ferons connaître les diverses maisons de Saxe qui les ont possédés.

I. Saxe ancienne.

1° La Saxe primitive, à l'époque des Mérovingiens, commençait à l'E. du Rhin, vers les rives de l'Ems et au N. de la Lippe, et s'étendait, au N., jusqu'à la Baltique et à l'Eyder (en Danemark), à l'E., un peu au delà de l'Elbe, ayant pour bornes la Thuringe, la France rhénane, la Frise, le pays des Danois et les peuplades slaves établies à l'O. de l'Oder. Elle se composait de trois grandes masses, l'Engerland (pays des Angres), la Westphalie et l'Ostphalie (dont la partie la plus orientale était le pays des Nordalbingiens). Tout ce pays était coupé en gaus ou cantons, et avait au plus quelques grosses bourgades, entre autres Ehresbourg. Les Saxons, ses habitants, étaient peu civilisés et grands pirates, comme leurs voisins les Danois. Dès la fin du IVe s. ils ravageaient les côtes de la Gaule et celles de la Grande-Bretagne. En 449, ils commencèrent à passer dans cette île, et quatre chefs saxons y fondèrent quatre des États de l'Heptarchie (V. ce nom). A partir de Clotaire II, ceux qui étaient restés en Allemagne durent payer tribut aux Francs ; mais ils se révoltèrent souvent : idolâtres, adorateurs d'Odin et d'Irminsul, ils répugnaient à l'idée de devenir Chrétiens. Charlemagne, après neuf expéditions célèbres (771-795), finit par les soumettre, malgré les efforts opiniâtres de leur chef Witikind : il leur imposa le baptême (785), leur donna un code sévère (la loi saxonne), et fonda chez eux huit évêchés (entre autres, Osnabruck, Brême, Paderborn, Munster). Cet état de choses dura jusqu'au traité de Verdun (843).

Premier duché de Saxe (843-1180). Sous Louis le Germanique et ses successeurs, la Saxe, grossie de