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attribuer, avec l'intendance du temple de Delphes, la présidence des jeux Pythiques (346). Puis il tourna de nouveau ses armes contre l'Épire et la Thrace, tout en se préparant à asservir la Grèce. Démosthène, qui avait deviné ses projets, ayant fait renouveler la guerre, Philippe éprouva d'abord des revers et fut contraint par Phocion de lever le siége de Byzance (340); mais, ayant pénétré en Grèce à l'occasion d'une nouvelle guerre sacrée, sous le prétexte de réprimer un attentat sacrilège (338), il attaqua la Béotie et l'Attique, prit Élatée et remporta la même année sur les Athéniens et les Thébains la victoire de Chéronée, qui ruina la liberté de la Grèce. Il n'abusa pas de sa supériorité sur ses faibles ennemis, et retourna bientôt en Macédoine pour préparer une grande expédition contre les Perses; mais il périt avant d'avoir pu l'accomplir : il fut assassiné, en 336, par Pausanias, seigneur macédonien, qui lui reprochait un déni de justice : on crut que le meurtrier n'était que l'instrument d'Olympias, 1re femme de Philippe, que ce prince venait de répudier pour épouser Cléopâtre. Philippe avait régné 24 ans. Alexandre le Grand, son fils, lui succéda. Ce prince joignait l'astuce au courage; c'est le plus profond politique de l'antiquité, mais aussi un des hommes les plus corrompus : il disait qu'aucune place n'est imprenable quand on peut y faire pénétrer un mulet chargé d'or.

PHILIPPE V (ou III), roi de Macédoine, fils de Démétrius, succéda en 221 av. J.-C. à son oncle Antigone-Doson, à l'âge de 15 ans. Il s'engagea presque aussitôt dans la Guerre des deux Ligues, prit parti pour les Achéens, remporta sur les Étoliens de grands avantages, fit conclure la paix en 217, et profita de sa puissance pour asservir presque toute la Grèce. Aratus, qui lui avait servi de tuteur, voulut employer en faveur de ses compatriotes l'influence qu'il croyait avoir sur lui : Philippe ne l'écouta pas; on le soupçonna même de l'avoir fait empoisonner (213). Ce prince s'était déjà imprudemment attiré l'inimitié de Rome, en faisant un traité avec Annibal, malgré les avis d'Aratus. Sa flotte fut détruite à l'embouchure de l'Aoüs, en 214 : il n'éprouva depuis que des revers, et fut forcé de signer une paix désavantageuse, 205. Ayant reçu du sénat en 200 l'ordre de cesser ses hostilités contre Athènes, Rhodes et Pergame, alliées de Rome, il refusa d'obtempérer et dès lors la paix fut rompue : il fut battu une 2e fois sur les bords de l'Aoüs, puis à Cynoscéphales, par Flamininus (197), et subit un traité honteux par lequel il abandonnait toute prétention sur la Grèce, et s'engageait à ne pas faire la guerre sans le consentement du sénat. Intimidé depuis lors par la puissance romaine, il repoussa toutes les sollicitations d'Annibal et d'Antiochus, roi de Syrie, qui le poussaient à reprendre les armes, et se montra obéissant aux moindres désirs du sénat; cependant, fatigué de plus en plus par les exigences de Rome, il se préparait à engager une nouvelle lutte, lorsqu'il mourut en 178. Sur de faux rapports, il avait mis à mort son fils Démétrius. Persée, son fils naturel, lui succéda.

PHILIPPE, roi de Syrie, fils d'Antiochus VIII Grypus, devint roi l'an 95 av. J.-C., à la mort de son frère Séleucus VI, et fut continuellement occupé à faire la guerre contre ses compétiteurs, Démétrius, Antiochus X, Antiochus XI, Antiochus XII. Déposé une 1re fois, il remonta peu après sur le trône; mais ses sujets, fatigués de guerres civiles, le déposèrent et appelèrent à régner Tigrane, déjà roi d'Arménie (80). Il mourut simple particulier, vers l'an 57.

PHILIPPE, roi de Judée, fils d'Hérode le Grand, avait dans sa jeunesse été accusé auprès de son père de crimes imaginaires, s'était justifié et était devenu le fils préféré. Envoyé à Rome après la mort d'Hérode pour défendre les droits de sa famille, il obtint d'Auguste, l'an 1er de J.-C, le titre de tétrarque avec plusieurs provinces du royaume de Judée (Trachonite, Batanée, Auranitide, Iturée), qu'il gouverna avec sagesse. Il agrandit le bourg de Bethsaïde, qu'il appela Julias (en l'honneur de Julie, fille d'Auguste); il augmenta également Panéas et l'appela Césarée en l'honneur de l'empereur (on la nomme aussi Cæsarea Philippi). Il mourut l'an 33 de J.-C. Sa tétrarchie fut, après sa mort, réunie à la province de Syrie.

PHILIPPE, dit l’Arabe, M. Julius Philippus Arabs, empereur romain, né à Bosra, dans l'Idumée, qui faisait alors partie de l'Arabie, était fils d'un chef de brigands. Il s'éleva par son courage et ses talents aux premiers grades de l'armée et se distingua dans la guerre contre les Perses; mais il n'usa de son influence que pour soulever les troupes, et, après le meurtre du jeune Gordien en Mésopotamie, il prit le titre d'empereur, 244. Il fit la paix avec les Perses en leur cédant la Mésopotamie, repoussa sur le Danube une invasion de barbares et revint à Rome en l'an 1000 (247 de J.-C.), pour y célébrer par des jeux séculaires le millième anniversaire de la fondation de la ville. Des lois sages et morales faisaient espérer un règne heureux; mais plusieurs légions se révoltèrent et proclamèrent divers empereurs (Jotapien, Marin, etc.); Dèce, envoyé contre elles par Philippe, revêtit la pourpre lui-même et marcha contre l'empereur. Philippe fut vaincu et tué à Vérone en 249. On a lieu de croire que cet empereur était chrétien.

II. Rois de France et Princes français.

PHILIPPE I, roi de France, fils de Henri I, né en 1053, lui succéda en 1060, à l'âge de 7 ans, sous la tutelle de Baudouin, comte de Flandre, son oncle maternel. A la mort de Baudouin, en 1067, il voulut intervenir dans les guerres qu'occasionna entre les fils de ce seigneur la succession au comté de Flandre, et se fit battre par Robert le Frison. Plus heureux en défendant le duc de Bretagne contre Guillaume le Conquérant, il força ce dernier à lever le siége de Dol. En 1087 il attira sur lui la colère du duc de Normandie par son refus de lui restituer le Vexin et par une allusion grossière à son excessif embonpoint; il ne fut délivré d'une nouvelle guerre que par la mort de Guillaume, qui succomba à Mantes après avoir pris et brûlé cette ville. En 1091, il répudia Berthe, sa 1re femme, et enleva, pour l'épouser, Bertrade, déjà mariée à Foulques, comte d'Anjou : cet adultère le fit excommunier en 1094; il resta dix ans sous le poids de cette sentence, qui lui aliéna les esprits et excita plusieurs révoltes, mais il finit par être contraint de se soumettre; déjà son pouvoir était si ébranlé qu'il dut associer au gouvernement son fils Louis le Gros. Il mourut en 1108. Ce prince indolent était resté spectateur indifférent de la conquête de l'Angleterre par Guillaume le Conquérant et de la 1re croisade. Il réunit le Gâtinais, cédé par Foulques le Réchin, 1068, le Vexin, par droit d’échute, 1082, et la vicomte de Bourges, qu'il acheta, 1100.

PHILIPPE II, dit Philippe-Auguste (parce qu'il était né au mois d’août, appelé alors auguste), roi de France, fils de Louis VII, lui succéda en 1180, âgé de 15 ans. Il épousa Isabelle de Hainaut, qui lui apporta en dot le comté d'Artois, remplit son trésor par de cruelles persécutions contre les Juifs, et fit plusieurs guerres heureuses et brillantes contre quelques grands vassaux, notamment contre le comte de Flandre et le duc de Bourgogne. Réclamant ensuite ses droits sur le Vexin, qu'un mariage avait donné à l'Angleterre, il lutta avec avantage contre Henri II en excitant ses fils contre lui. A la mort de ce prince, en 1189, il s'unit étroitement avec Richard Cœur de Lion et entreprit avec lui la 3e croisade dans le but de reprendre Jérusalem sur Saladin. Dès leur arrivée en Sicile, les deux rois eurent de violents démêlés; Philippe se rendit cependant en Asie et eut une part glorieuse à la prise de St-Jean-d'Acre, en 1191; mais il revint promptement en France, où il suscita des ennemis à Richard; l'influence du pape put seule l'empêcher d'attaquer ses États. Au retour de Richard, la guerre éclata entre les deux rois. Philippe n'obtint pas de grands succès tant que vécut son rival, mais, à la mort de ce prince (1199), il se vit en