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mépris de la mort. Les préceptes sont la circoncision, la prière, l’aumône, les ablutions, le jeûne (surtout pendant le Ramadan), les sacrifices dans quelques occasions solennelles, et l’abstinence du vin et de toute liqueur fermentée. La polygamie était permise ; cependant on ne pouvait avoir plus de 4 femmes légitimes. De nombreux ouvrages ont été publiés sur Mahomet : Aboul-Féda est la principale source à consulter : sa Vie du prophète a été trad. par Noël Desvergers, 1838. La Vie de Mahomet a été en outre écrite en français par Gagnier, Amst., 1732 ; en allemand, par G. Weil, Stuttgard, 1843 ; en anglais, par le W Springer, Allahabad, 1855. M. Reinaud a donné une Notice sur Mahomet, et M. Barthélémy St-Hilaire une étude sur Mahomet et le Coran.

MAHOMET I, sultan ottoman, fils de Bajazet I, succéda en 1413 à son frère Mouça, qu'il avait vaincu avec l'aide de l'emp. Manuel. Il releva et raffermit l'empire, ébranlé par Tamerlan, délivra Bagdad, assiégée par le prince de Caramanie, vainquit un imposteur, Mustapha, qui se disait son frère, soumit les Serviens, les Bosniaques, les Bulgares, et les Valaques. Il est le premier sultan qui ait eu une armée navale : il disputa l'empire de la mer à la république de Venise, jusqu'alors toute-puissante. Il mourut en 1421, à 47 ans.

MAHOMET II, le Conquérant, succéda en 1451, âgé de 21 ans, à son père Amurat II. En 1453, à la tête d'une armée formidable, il attaqua Constantinople, défendue par l'empereur Constantin Dracosès et emporta d'assaut cette ville, dont il fit la capitale de son empire. Ses généraux subjuguaient pendant ce temps la Thrace et la Macédoine ; mais ils échouèrent en Albanie contre le fameux Scander-Beg ; il fut lui-même complètement défait devant Belgrade, en 1456, par Jean Hunyade, et se vit contraint de fuir après avoir perdu 40 000 hommes. Néanmoins, il soumit dans la suite la Grèce centrale, où régnaient deux frères de Constantin Dracosès, ainsi que la Servie (1459) ; mit fin en 1461 à l'empire de Trébizonde, que gouvernaient les Commène depuis 1204 ; subjugua en 1462 l'île de Lesbos ; vainquit et déposséda le voïvode de Valachie qui refusait de payer tribut ; s'empara de la Bosnie (1463), de la Caramanie (1464), et de l'île de Négrepont, qu'il enleva aux Vénitiens (1470). Deux ans après, il battit en Cappadoce le roi de Perse qui avait fait invasion dans l'Anatolie ; il enleva en 1475 Caffa aux Génois, conquit Scutari, Zante, Céphalonie, rendit la Géorgie et la Circassie tributaires, soumit la Moldavie, l'Albanie et les îles de l'Adriatique ; envahit le Frioul et la Dalmatie ; força en 1478 les Vénitiens à acheter une paix humiliante, entra en 1480 en Italie et s'empara d'Otrante. Mais il échoua devant l'île de Rhodes, défendue par les chevaliers de St-Jean de Jérusalem. Il mourut en 1481, à Nicomédie, lorsqu'il menaçait à la fois Rome, la Perse et l’Égypte. A la gloire des armes, il joignit celle des lettres et fonda des écoles ; mais il se souilla par des cruautés révoltantes. Guillet a donné une Histoire de Mahomet II, Paris, 1681.

MAHOMET III, succéda à son père Amurat III en 1595, à 27 ans, et commença par faire étrangler 19 de ses frères et noyer 10 femmes que son père avait laissées enceintes. L'empereur Rodolphe II et les princes de Transylvanie, de Valachie et de Moldavie se liguèrent contre lui, et lui disputèrent la Hongrie. Il vint assiéger Agria en 1596, et y entra par composition ; un mois après, son lieutenant Cicala-Pacha vainquit les Impériaux à Careste. Mais cette victoire n'empêcha pas Mahomet de perdre diverses places fortes en Hongrie ; des révoltes qui éclatèrent en Asie vinrent ajouter à ses embarras. Il mourut de la peste en 1603.

MAHOMET IV, fut placé sur le trône en 1649, à l'âge de sept ans, après le meurtre d'Ibrahim, son père. Il eut pour ministres les deux Koproli (père et fils), qui jetèrent de l'éclat sur la 1re partie de son règne : les îles de Mételin et Lemnos furent conquises sur les Vénitiens (1660) ; Peterwaradin fut enlevé aux Autrichiens (1661) ; la capitale de l'île de Candie fut prise d'assaut (1669) ; le sultan lui-même prit Kaminiets sur les Polonais (1672). Cependant Mahomet IV avait, dès 1664, perdu la bataille de St-Gothard contre les Impériaux et avait été obligé de signer la paix de Temeswar. La fin de son règne fut remplie par des désastres : ses troupes furent vaincues en 1673 à Choczim par les Polonais, et en 1683 sous les murs de Vienne par le roi de Pologne Sobieski, uni aux troupes de l'empereur ; les Impériaux lui enlevèrent les villes de Wivar (1685) et de Bude (1686) et le battirent à Mohacz (1687) ; tandis que les Vénitiens s'emparaient de l'Attique et de la Morée (1688). Tant de revers amenèrent le soulèvement de l'armée de Hongrie, qui déposa Mahomet IV et mit à sa place Soliman II, son frère. Il vécut encore 5 ans et m. en 1693. C'était un prince juste et clément, mais faible et ennemi de toute occupation sérieuse ; il passait sa via à la chasse. — V. MOHAMMED, MÉHÉHET ou MAHMOUD.

MAHOMÉTISME ou ISLAMISME, religion de Mahomet, fut fondée en Arabie vers l'an 610 de J.-C., mais ne date que de l'an 622, époque de l’Hégire ou fuite de Mahomet à Médine (V. MAHOMET). Après s'être établie en Arabie du vivant du prophète, elle fut propagée par les armes des Arabes dans toute l'Asie, en Afrique, et même dans une partie de l'Europe (Grèce, Espagne, Sicile), et s'établit dans l'anc. empire grec après la prise de Constantinople par Mahomet II (1453). Chassée d'Espagne avec les Maures aux XIVe et XVe siècles. elle règne encore auj. sur une grande partie du globe : l'Asie occidentale, l'Afrique septentrionale, la Turquie ; et quoiqu'elle soit en décadence, elle compte environ 200 millions de sectateurs. Les Mahométans reconnurent longtemps pour chefs les califes, vicaires de Mahomet (V. CALIFES) ; depuis la destruction du califat, ils n'ont plus de chef véritable, bien que le sultan de Turquie ait la prétention de posséder l'étendard du prophète. Les Mahométans se divisent en un grand nombre de sectes dont les principales sont celles des Sunnites (ou orthodoxes), des Chyites, des Druses, des Ismaéliens. V. ces noms.

MAHON ou PORT-MAHON, Portus Magonis, v. et port de l'île de Minorque, ch.-l. de l'île, sur un golfe de la côte E. ; 15 000 hab. Évêché. Ville bien située et bien bâtie ; port sûr et commode ; fort St-Philippe, arsenal, chantiers de construction, lazaret ; belle cathédrale. Un peu de commerce ; pêche et cabotage. — Fondée, dit-on, dès l'an 702 av. J.-C. par le Carthaginois Magon, dont elle prit le nom ; fortifiée plus tard parmi autre Magon, frère d'Annibal. Elle fut prise aux Espagnols par les Anglais en 1708, reprise sur ceux-ci en 1756 par les Français, commandés par le maréchal de Richelieu, mais rendue aux Anglais en 1763. Les Espagnols, aidés des Français, s'en emparèrent en 1782, après un siége mémorable ; ils l'ont conservée depuis.

MAHRATTES, c.-à-d. grands guerriers, peuple de l'Hindoustan, qui primitivement habitait au N. O. du Décan, dans les monts Vindhya et les Ghattes occid., mais qui, après la mort d'Aureng-Zeb et surtout pendant le règne de Mohammed-Chah (1718-1747), assujettirent la plus grande partie de l'Inde moyenne (ou Décan sept.), entre la prov. d'Agra au N. et la Kistnah au S., et s'étendirent d'une mer à l'autre. Leurs possessions se divisèrent en plusieurs États, unis par une espèce de fédération. Les Mahrattes orientaux possédaient le Gandouana et l'Orissa et avaient pour ch.-l. Nagpour ; les Mahrattes occidentaux possédaient le Malwa, une partie du Kandeich, de l'Aurengabad, du Daouletabad ; leur ch.-l. était Pounah. — Les Mahrattes, après le 1er pillage de Delhi par Nadir-Chah, marchèrent aussi contre le Grand-Mogol. Ils prirent sa capitale (1760), et tentèrent de substituer leur domination à celle du Grand-Mogol dans l'Inde ; la victoire remportée sur eux à Panipet (1761) par les Afghans les refoula dans leurs possessions. De 1774 à 1783, ils furent sans cesse en guerre soit avec les Afghans, soit entre eux. Après la chute de Tippou-Saëb (1799) et la conquête du Maïssour par les An-