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ayant anéanti le pouvoir du roi à Paris, il s'échappa, assembla les États à Blois, y appela le duc de Guise, et l'y fit assassiner, en 1588. Ce crime souleva contre lui toute la France catholique, et il fut obligé d'avoir recours à Henri de Navarre. Avec lui il assiégea Paris, et il était sur le point de s'en emparer lorsqu'il fut assassiné par J. Clément, le 1er août 1589 ; il expira le lendemain. Ce prince s'était rendu méprisable, même aux hommes de son parti, par sa faiblesse, ses débauches, sa honteuse condescendance pour ses favoris, que l'histoire a flétris sous le nom de mignons, par ses prodigalités, et sa superstition. Avec lui s'éteignit la maison de Valois.

HENRI IV, dit le Grand, né en 1553, au château de Pau, était fils d'Ant. de Bourbon, duc de Vendôme, et de Jeanne d'Albret, reine de Navarre. Il descendait de Robert, comte de Clermont, 6e fils de S. Louis, et se trouvait être héritier légitime de la couronne de France à l'extinction de la famille de Valois. Sa mère l'éleva dans la religion réformée ; il apprit l'art de la guerre sous l'amiral Coligny. Après le traité de St-Germain (1570), il épousa la sœur du roi, Marguerite de Valois ; il devint roi de Navarre à la mort de sa mère, 1572. Quoique beau-frère du roi, il ne put échapper au massacre de la St-Barthélemy qu'en se faisant catholique. Malgré sa soumission il fut gardé à vue, et ne parvint à s'évader qu'à la mort de Charles IX, en 1575. Alors il rétracta une abjuration forcée, revint à son ancien culte, et se mit à la tête du parti huguenot. De nombreux succès, notamment une victoire remportée à Coutras sur Joyeuse (1587), et le courage, l'habileté, la franchise, la générosité dont il donnait tous les jours des preuves, lui firent bientôt un grand renom. Après la journée des Barricades (1558), Henri III fit sa paix avec lui, et les deux princes vinrent assiéger Paris, qui était au pouvoir des Ligueurs. A la mort de Henri III, il fut reconnu roi de France par une partie de l'armée, le 2 août 1589, mais la Ligue refusa de le reconnaître et proclama roi le vieux cardinal de Bourbon sous le nom de Charles X. En même temps, la défection d'un grand nombre de catholiques le forçait de lever le siége de Paris. Deux victoires, remportées sur Mayenne, chef de la Ligue, à Arques (1589) et à Ivry (90), relevèrent ses affaires, et il put reprendre le siége de Paris ; mais il dut le lever encore à l'approche du duc de Parme, qui l'empêcha aussi de prendre Rouen (1592). Malgré son courage et ses habiles manœuvres, la guerre eût duré peut-être longtemps encore s'il n'eût consenti à abjurer le Calvinisme (1593); Paris ouvrit bientôt ses portes, et les chefs de la Ligue se soumirent l'un après l'autre. Cependant il eut encore à livrer quelques combats : la victoire de Fontaine-Française lui soumit la Bourgogne (1595) et la prise d'Amiens réduisit la Picardie (1596). En 1598, Henri publia l’Édit de Nantes par lequel il assurait aux Calvinistes la liberté religieuse avec d'importants privilèges, et signa avec le roi d'Espagne la paix de Vervins. Depuis lors il donna tous ses soins au gouvernement et ne s'occupa plus qu'à guérir les plaies de la guerre civile. Les finances, dirigées par Sully, devinrent prospères ; le commerce, l'agriculture, les arts furent protégés : il mérita d'être surnommé le Restaurateur de la France. A l'extérieur, Henri IV reprit les projets de François I et de Henri II contre la maison d'Autriche, rétablit l'influence française en Italie, acquit de la Savoie la Bresse, le Bugey et le Valromey (1601), soutint les Pays-Bas insurgés contre l'Espagne, rapprocha en Allemagne les Luthériens et les Catholiques. Il avait, assure-t-on, formé le projet d'une espèce de République chrétienne, où les différends auraient été jugés par une diète souveraine, où toutes les religions auraient été mises sur le pied de l'égalité. Il voulait avant tout, établir l'équilibre entre les grandes puissances, et déjà il armait contre l'Autriche pour faire restituer aux héritiers protestants de Juliers les domaines confisqués sur eux par l'empereur Mathias, lorsqu'il fut assassiné : il fut frappé le 14 mai 1610 d'un coup de couteau par le fanatique Ravaillac. Déjà plusieurs conspirations (V. Biron, Bouillon) ef plusieurs tentatives d'assassinat (V. Barrière, Châtel) avaient été faites contre lui. Henri IV a été justement surnommé par la postérité le bon Henri, à cause de l'amour qu'il avait pour son peuple. Ce prince n'est pas moins connu par sa galanterie que par ses qualités guerrières et politiques ; il eut plusieurs maîtresses dont la plus célèbre est Gabrielle d'Estrées. Son mariage avec Marguerite de Valois ayant été déclaré nul en 1599, Henri avait épousé Marie de Médicis, en 1600. Il eut pour successeur Louis XIII, son fils. Sa Vie a été écrite par Péréfixe, et son Histoire par M. Poirson (1857). Voltaire l'a pris pour le héros de sa Henriade. M. de Rommel a publié en 1840 sa Corresp. inéd. avec Maurice, landgrave de Hesse. M. Berger de Xivrey a donné les Lettres de Henri IV dans les Documents inéd. de l'Hist. de France (7 vol. in-4, 1843-55).

III. Rois d'Angleterre.

HENRI I, dit Beauclerc, 3e fils de Guillaume le Conquérant, né en 1068, m. en 1135, porta d'abord le titre de duc de Normandie. A la mort de son frère Guillaume le Roux, il usurpa la couronne au préjudice de Robert Courte-Heuse, son frère aîné, en 1100 : ce dernier réclama, mais il fut vaincu et fait prisonnier à Tinchebray (1106). Henri, consolidé sur le trône, fit oublier son usurpation par un règne heureux et habile. La charte qu'il donna à ses barons est regardée comme la première origine des libertés anglaises. Henri fut entraîné dans quelques guerres soit contre les comtes d'Anjou et de Flandre, soit contre le roi de France Louis le Gros, qu'il Battit à Brenneville (1119). Il eut aussi de vifs démêlés avec S. Anselme, archevêque de Cantorbéry, au sujet des investitures. On l'avait surnommé Beau clerc à cause de son amour pour les lettres. Son neveu Étienne lui succéda, au préjudice de sa fille Mathilde, qu'il avait désignée.

HENRI II, fils de Geoffroy Plantagenet, comte d'Anjou, et de Mathilde, fille de Henri I, naquit en 1133 et devint roi d'Angleterre à la mort d’Étienne en 1154. Avant de monter sur le trône, il avait épousé Éléonore de Guyenne, que Louis VII venait de répudier (1152). Il conquit l'Irlande en partie (1171), rendit l’Écosse vassale, et réforma l'administration et la justice. Ses possessions en France comprenaient, outre la Normandie, les domaines de son père (Anjou, Touraine, Maine et Berry), ceux de sa femme Éléonore de Guyenne (Guyenne, Poitou, Saintonge, Auvergne, Périgord, Angoumois, Limousin), et de plus la Bretagne, qu'il acquit en 1166. Son règne fut troublé par une lutte qu'il engagea inconsidérément contre Th. Becket, archevêque de Cantorbéry, et contre le clergé d'Angleterre, en publiant les Constitutions de Clarendon qui restreignaient la juridiction des tribunaux ecclésiastiques : l'église l'emporta, mais Thomas Becket périt assassiné (1170). Excommunié pour ce meurtre, qu'il avait provoqué, sinon commandé, Henri se vit de plus attaqué par tous ses ennemis, auxquels se joignirent ses propres fils et sa femme Éléonore. Vainement il révoqua les constitutions de Clarendon et se soumit à recevoir la discipline sur le tombeau de Th. Becket : la révolte, quelque temps apaisée, recommença avec plus de violence, soutenue par le roi de France Louis VII et par Philippe-Auguste, et le malheureux roi succomba à. l'excès de sa douleur ; il mourut à Chinon en 1189. Richard Cœur de Lion lui succéda.

HENRI III, fils de Jean sans Terre, n'avait que 9 ans lorsqu'il succéda à son père, en 1216. La régence fut confiée au duc de Pembroke, qui sut rattacher au jeune prince les barons révoltés contre son père et éloigner son compétiteur, Louis de France (depuis Louis VIII). A partir de 1219, Henri III gouverna seul. Il voulut recouvrer ses domaines de France, que Philippe-Auguste avait enlevés à Jean sans Terre ; mais il fut battu par S. Louis à Taillebourg et à Saintes en 1242, et ne dut qu'aux scrupules du saint roi d'être rétabli dans une partie des possessions de sa