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dans ses compositions une vérité saisissante, un style riche et un coloris admirable : on l’a surnommé le Raphaël du paysage. Ses principales toiles sont : le Sacre de David, le Débarquement de Cléopâtre, la Fête villageoise, la Vue d’un port de mer au soleil couchant. Il était aussi habile graveur : on a de lui une suite de 28 paysages qui est fort recherchée.

LORRAIN (Robert le), sculpteur, né à Paris en 1666, m. en 1743, élève de Girardon, puis du Bernin, dont il subit l’influence, fut reçu à l’Académie en 1701, y fut nommé professeur en 1717, et recteur en 1737. On a de lui : un Faune, pour la cascade de Marly ; un Bacchus, dans le jardin de Versailles ; S. Émilien, aux Invalides, etc. Ses œuvres sont empreintes de manière et d’afféterie ; elles manquent de correction et de pureté. Il forma Lemoine et Pigale.

LORRAIN (L. Joseph le), né à Paris en 1715, m. à St-Pétersbourg en 1760, se distingua à la fois comme peintre et comme graveur et fut reçu académicien en 1756. Il alla se fixer en Russie et devint directeur de l’Académie des arts de St-Pétersbourg. Parmi ses gravures on cite : le Jugement de Salomon ; Esther devant Assuérus, la Mort de Cléopâtre, etc.

LORRAINE, Lotharingia. On a désigné sous ce nom : 1o  le Royaume de Lorraine ou Lotharingie ; 2o  le Duché de Lorraine ou Lorraine proprement dite ; 3o  le Grand-gouvernement de Lorraine-et-Barrois.

I. Royaume de Lorraine ou de Lotharingie, roy. formé en 855, après l’abdication de Lothaire I, en faveur de son 2e  fils, Lothaire II, qui lui donna son nom. Il s’étendait entre la Meuse, l’Escaut et le Rhin jusqu’à la mer, et avait pour bornes au N. la Frise, au N. E. le duché de Saxe, à l’E. la Franconie et la Souabe, au S. la Bourgogne Transjurane, au S. O. la Champagne, à l’O. le Vermandois et la Flandre, au N. O. la mer du Nord. Lothaire II étant mort sans enfants légitimes (869), ce royaume fut, en vertu du traité de Mersen, partagé entre ses oncles, Louis le Germanique et Charles le Chauve, puis entre Louis le Jeune et Charles le Gros. Ce dernier avait fini par réunir à ses États la Lorraine tout entière ; après sa déposition (887), elle devint la possession d’Arnoul de Carinthie, qui en 895 en investit son fils Zwentibold. Après le meurtre de celui-ci (900), les Lorrains se donnèrent à Louis IV l’Enfant, roi de Germanie ; en 911, ils reconnurent Charles le Simple, roi de France. Soumis en 923 par Henri Ier l’Oiseleur, reconquis pour un instant en 939 par Louis d’Outremer, ils rentrèrent sous la domination allemande en 940. La Lorraine fut désormais gouvernée par des ducs. En 954, l’empereur Othon le Grand, contre lequel Conrad, duc de Lorraine, s’était révolté, donna ce duché à son propre frère Brunon, archevêque de Cologne : celui-ci, en 959, le divisa en Haute et Basse-Lorraine, qui eurent chacune des ducs particuliers.

La Haute-Lorraine ou Lorraine Mosellane était au S., entre les Vosges, la Bourgogne, la Champagne et la Franconie Transrhénane ; elle était parcourue par la chaîne des Vosges et arrosée par la Moselle : c’est ce pays qui forma ce qu’on a depuis appelé spécialement Lorraine (V. ci-après duché de LORRAINE).

La Basse-Lorraine ou Lorraine Ripuaire, dite aussi duché de Lothier, était au N., entre le Rhin, la Meuse et l’Escaut (d’où son nom de Ripuaire) ; elle avait au N. la mer du Nord, au N. E. la Frise, au S. la Hte-Lorraine, à l’O.le Vermandois et la Flandre, comprenant à peu près les Pays-Bas actuels et la Prusse rhénane. Othon II donna en 977 le duché de B.-Lorraine à Charles de France, fils puîné de Louis IV d’Outremer, qui lui en fit hommage. Othon, fils de Charles, étant mort sans enfants (1004), le duché fut donné à Godefroi, comte de Verdun, à qui succédèrent Gothelon, son frère, et Godefroy II, le Bossu, fils de Gothelon, puis le célèbre Godefroy de Bouillon, son neveu (1089). Ce dernier s’étant croisé peu après, la Basse-Lorraine fut possédée par Henri de Limbourg, puis par Godefroy le Barbu, comte de Louvain, qui en fut investi en 1106. Ce prince fut la tige des ducs de Brabant.

II. Duché de Lorraine (l’ancienne Hte-Lorraine on L. Mosellane), contrée de l’anc. France, était com prise entre la Basse-Lorraine au N., l’Alsace à l’E., la Franche-Comté au S., la Champagne au S. O. et à l’O. Elle avait pour capitale Nancy, et se divisait en trois bailliages généraux, le bailliage de Nancy ou bailliage français, le bailliage des Vosges, et le bailliage de Vaudrevange ou bailliage allemand. - Le duché de Hte-Lorraine eut pour 1er duc particulier Frédéric d’Alsace, frère d’Adalbéron, évêque de Metz, et beau-frère de Hugues Capet (959) : il reçut ce duché de l’empereur Othon I. Frédéric II, son petit-fils, étant mort sans enfants (1033), Gothelon, déjà duc de Basse-Lorraine, lui succéda. Après la mort d’Albert, successeur de Gothelon (1048), l’empereur Henri III donna le duché de Hte-Lorraine à Gérard d’Alsace, qui fut le 1er duc héréditaire et la tige de l’illustre maison de Lorraine, qui subsiste encore. Ses descendants possédèrent la Lorraine jusqu’en 1737. Mais sous Louis XIII, Louis XIV et Louis XV, leurs États avaient été un perpétuel sujet de guerre, et même les ducs en furent quelque temps dépossédés (notamment de 1661 à 1697). En 1737, le duché fut, d’après un arrangement fait avec la France, cédé au roi de Pologne Stanislas Leczinski, beau-père de Louis XV, par le duc François III, qui reçut en échange le grand-duché de Toscane ; après la mort de Stanislas, la Lorraine fut définitivement réunie à la France (1766). Elle forma alors avec le duché de Bar le grand-gouvernement de Lorraine-et-Barrois (V. ci-après).

Ducs de Lorraine.
Frédéric ou Ferri I, 959 Raoul, 1328
Thierry, 984 Jean I, 1346
Frédéric II, 1026 Charles I, 1391
Gothelon, 1033 René I et Isabelle, 1431
Albert, 1046 Jean II, 1453
Gérard (1er duc héréditaire), 1048 Nicolas, 1470
Thierry II, 1070 René II et Yolande, 1473
Simon I, 1115 Antoine, 1508
Matthieu I, 1139 François I, 1544
Simon II, 1176 Charles II, 1545
Ferri I, 1205 Henri, 1608
Ferri II, 1206 François II, 1624
Thibault I, 1213 Charles III et Nicole, 1624
Matthieu II, 1220 Charles IV, 1675
Ferri III, 1251 Léopold, 1690
Thibault II, 1304 François III, 1729
Ferri IV, 1312 Stan. Leczinski, 1737-66

N. B. Quelques auteurs regardent comme 1er duc de Lorraine Charles, fils de Louis d’Outremer, connu sous le nom de Charles de Lorraine, et donnent le nom de Charles II à celui que nous nommons ici Charles I ; mais c’est là une erreur : Charles de Lorraine ne régna jamais que sur la Basse-Lorraine (le Brabant), qui ne doit pas être confondue avec la Hte-Lorraine, celle dont Nancy est la capitale, et qui a seule retenu le nom de Lorraine.

III. Lorraine-et-Barrois, grand-gouvernement de l’anc. France, formé en 1766 après la réunion du duché de Lorraine à la France, était situé entre le Luxembourg et l’électorat de Trêves au N., le Bas— Palatinat et le duché des Deux-Ponts au N. E., l’Alsace à l’E., la Franche-Comté au S., la Champagne à l’O. Il comprenait : 1o  le Duché de Lorraine ; 2o  le Duché de Bar ou Barrois ; 3o  les Trois évêchés de Metz, Toul et Verdun, qui formaient deux petits gouvernements enclavés dans le grand ; 4o  le Luxembourg français (Thionville, Montmédy, Longwy) ; 5o  le Duché de Carignan ; 6o  la Lorraine allemande ou Pays de la Sarre, cédée à la France par le traité d’Utrecht, en 1713 ; 7o  le Duché de Bouillon, enlevé par Louis XIV à l’évêque de Liége. Le grand-gouvt de Lorraine-et-Barrois a formé 4 dép. : Moselle, Meurthe, Meuse, Vosges, plus une partie de la Hte-Marne et du Luxembourg dans les Pays-Bas. Dom Calmet a écrit l’Histoire de la Lorraine, 1728,