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de Badajoz, dont un article secret lui assurait plusieurs millions ; déclara la guerre à l’Angleterre en 1804, sous la pression de la France, et reçut à cette occasion le titre de généralissime, mais ne put empêcher que l’Espagne, battue à Trafalgar, perdît ses plus belles colonies ; tenta en 1806 de secouer le joug de Napoléon, et seconda en secret la coalition du Nord, mais s’empressa, dès qu’il connut les victoires d’Iéna et d’Austerlitz, de mettre son pays à la discrétion de l’Empereur ; excita, par cette lâche conduite, l’indignation universelle en Espagne, et vit le propre fils du roi, le prince des Asturies (Ferdinand VII), se mettre à la tête des mécontents ; ne craignit pas, sur l’ordre de Charles IV, de faire incarcérer ce prince, et de le traduire en jugement comme conspirateur, mais fut arrêté dans sa vengeance par l’intervention de Napoléon, qui se réserva le jugement du différend ; prévit dès lors le sort de la monarchie espagnole, et détermina le roi et la reine à quitter Madrid et à s’embarquer pour le Mexique ; mais échoua encore dans ce projet, par suite de la révolte d’Aranjuez (18 mars 1808), qu’avait fomentée le prince des Asturies, et n’échappa à la fureur populaire que par l’abdication de Charles IV ; fut jeté dans une étroite prison par Ferdinand, devenu roi pour un instant, mais fut relâché au bout de quelques jours sur les instances de la France, et amené à Bayonne, où il contribua à déterminer Charles IV à signer son abdication ; accompagna la famille royale dans ses diverses résidences en France et en Italie ; vint, après la mort des deux époux, se fixer à Paris, vécut dans l’obscurité dans cette ville et y mourut en 1851, dans sa 85e année. Il avait été marié en 1797 à une princesse du sang royal, Maria Teresa de Bourbon, fille de l’infant don Louis, et cousine du roi, qui ne lui donna sa main qu’avec répugnance. Le prince de la Paix a été l’objet d’accusations de toute nature, dirigées les unes contre ses mœurs, les autres contres sa politique : il a rédigé, pour réfuter ces dernières, des Mémoires, qui ont été traduits par J. G. d’Esménard, Paris, 1836-38, 4 vol. in-8. Bien que manquant d’instruction et de moralité, Godoy connaissait bien les hommes et les employait habilement : il était doux, et ne versa jamais de sang.

GODWIN (le comte), seigneur anglais d’origine saxonne, fils d’Ulfnoth, comte de Sussex, ou, selon d’autres, d’un simple pâtre, exerça pendant plusieurs années sur les rois d’Angleterre un pouvoir égal à celui qu’eurent en France les maires du palais, maria sa fille Édith au roi Édouard le Confesseur, et prépara à son fils Harold les moyens d’usurper le trône. Chef du parti anglais contre les Normands introduits à la cour, il se révolta en 1051. Défait avec ses fils, il s’enfuit à Bruges ; cependant il put rentrer en Angleterre et même recouvra sa faveur. Il mourut subitement en 1054, étant à table avec le roi Édouard.

GODWIN (William), écrivain anglais, né en 1756 à Wisbeach (Cambridge), mort en 1836, fut d’abord prédicateur et ministre d’une congrégation non conformiste. Il abandonna l’église pour se faire écrivain, se fixa à Londres et y fit paraître plusieurs ouvrages qui excitèrent au plus haut point l’attention publique : la Justice politique, 1793, où il peignait avec talent les plaies sociales ; mais où il attaquait la plupart des institutions, même le mariage et la propriété ; Caleb Williams, 1794, roman philosophique, écrit dans le même but, qu’il fit suivre de Fleetwood, de Mandeville, 1817, etc. On a de lui aussi une Vie de Chaucer, 1803, et une bonne Histoire de la république d’Angleterre, 1824-1828. A la fin de sa vie, il se fit libraire. Malgré ses déclamations contre le mariage, il se maria deux fois. Sa 1re femme, miss Wollstoncraft, est connue par quelques écrits, surtout par une Défense des droits des femmes, 1790. Les écrits de Godwin sont remarquables par l’éloquence et l’énergie : il y exalte jusqu’à l’extrême les vertus morales, et attribue une grande part dans les actions humaines aux motifs désintéressés, s’opposant ainsi à Bentham qui ramenait tout à l’utile. Il rétracta dans ses derniers ouvrages quelques théories trop avancées. Plusieurs de ses écrits ont été traduits en français, notamment Caleb Williams, par G. Garnier, Paris, 1794, et par Sam. Constant de Rebecque, Genève, 1795.

GŒLHEIM, bourg de Bavière (cercle du Rhin), près de Kaiserslautern, et à 45 kil. S. de Mayence ; 1200 hab. Adolphe de Nassau y fut défait et tué en 1298 par Albert d’Autriche. Un monument y consacre ce souvenir.

GŒMŒR, comitat de Hongrie, dans le cercle en deçà de la Theiss, entre ceux de Zips et de Lipto au N., de Hevesch et de Neograd au S. : 99 k. sur 70 ; 222 000 hab. Ch.-l. Gross-Steffelsdorf, et auparavant Pleisnicz. Montagnes, forêts ; climat froid. Bétail, lin, vin, tabac, peu de grains ; fer de qualité supérieure, aimant. — Ce comitat est ainsi nommé d’une petite ville de Gœmœr, qui y est située.

GŒRLITZ, v. murée des États prussiens (Silésie), sur la Neisse, à 80 kil. O. de Liegnitz ; 20 000 hab. Plusieurs monuments. Société des sciences, collection de cartes géographiques. Cabinets de physique, de minéralogie, de médailles, de machines, etc. ; bibliothèques. Draps, toiles, rubans de fil, chapeaux.

GŒRRES (J. Joseph), écrivain, né à Coblentz en 1776, mort à Munich en 1848, adopta d’abord les doctrines de la Révolution et la philosophie de la nature de Schelling, tout en les alliant à des idées mystiques, publia, à partir de 1807, avec Arnim et Brentano, une collection de Livres populaires de l’Allemagne, où il remettait en honneur les légendes du moyen âge, fut en 1813 un des plus ardents à soulever ses compatriotes contre les Français, et rédigea dans ce sens le Mercure rhénan ; mais, ayant continué l’agitation démagogique après 1815, il devint suspect et fut forcé de sortir des États prussiens (1819). Ses idées s’étant depuis tournées vers le catholicisme, il fut accueilli par le roi de Bavière, qui lui confia en 1827 une chaire de littérature et d’histoire à l’Université de Munich. Outre ses écrits politiques et religieux, on a de lui une Histoire mythique de l’Asie, le Livre héroïque de l’Iran (d’après le Schah-Nameh de Ferdoucy, Berlin, 1820), et la Mystique chrétienne, 1836-42 (trad. par M. Ste-Foy, 1855). Gœrres avait fini par devenir un des chefs de l’école catholique allemande. — Son fils, Guido G., mort en 1852, l’a suivi dans cette voie et a écrit une Histoire de Jeanne d’Arc.

GŒRTZ (G. Henri SCHLITZ, baron de), ministre de Charles XII, né dans la seigneurie de Schlitz en Franconie, avait d’abord servi le duc de Holstein-Gottorp. Charles XII le choisit pour son ministre après son retour de Bender : il eut l’art de créer de nouvelles ressources pour continuer la guerre ; mais il lui fallut, pour l’exécution de ses plans, recourir à des mesures arbitraires qui soulevèrent contre lui une partie de la nation. Accusé après la mort du roi de haute trahison et de dilapidation, il fut condamné à mort sans avoir été entendu, et exécuté à Stockholm en 1719. Son vrai crime était d’être étranger.

GŒRTZ (J. Eustache, comte de), diplomate, né en 1737, en Franconie, de la même famille que le précédent, mort en 1821, s’attacha à la cour de Weimar, fut chargé de l’éducation des enfants de la duchesse douairière Amélie, et forma le prince Charles-Auguste, qui fit de Weimar l’Athènes de l’Allemagne ; puis entra au service du roi de Prusse Frédéric II, fut chargé par lui de diverses négociations en Russie, en Hollande, où il obtint peu de succès, et fut enfin ministre de Prusse à la diète de Ratisbonne. Il a laissé des Mémoires sur les négociations qui ont précédé le partage de la Pologne, Weimar, 1810, et sur les Négociations pour la cession de la Bavière en 1778, Francfort, 1812,

GŒTHA-ELF, riv. de Suède, sort du lac Wener,