Page:Bouillet - Chassang - Dictionnaire universel d'histoire-geo - 1878 - P1 - A-G.djvu/254

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

millions. La France en est presque tout à fait délivrée, c'est en Norvége, en Hongrie, en Turquie et dans les contrées méridionales de la Russie qu'ils se trouvent en plus grand nombre. Les Bohémiens sont de haute taille et basanés; ils se font remarquer par la blancheur de leurs dents; du reste ils sont en général d'une laideur repoussante. Ils ont une sorte d'argot qu'ils parlent entre eux. On ne sait pas trop quelle religion ils professent; leur morale est fort relâchée et le vol très-commun parmi ces vagabonds. En France, les États généraux de 1560 ont prononcé contre eux un bannissement perpétuel. L’Histoire des Bohémiens a été écrite en allemand par Grellmann, (trad. par J. Paris, 1810), et par A. F. Pott, Hall, 1845.

BOHÉMOND (Marc), prince d'Antioche, était fils du célèbre Robert Guiscard. Après la mort de son père (1085), il obtint en partage la principauté de Tarente; mais, voulant augmenter ses domaines, il se joignit aux Croisés (1096), et alla mettre le siége devant Antioche. Il s'empara de cette ville par ruse, s'en fit reconnaître prince (1098), et y établit un petit empire, qui subsista environ 190 ans. Étant tombé dans un combat au pouvoir des Turcs, il se racheta en payant une forte rançon. A peine fut-il libre, qu'il tenta de nouvelles aventures : il réussit a agrandir ses États, et alla faire la guerre à l'empereur Alexis. Voulant traverser la flotte des Grecs pour venir en Europe chercher de nouvelles troupes, il se fit passer pour mort, et revint bientôt à la tête d'une armée formidable. Mais la peste et la famine le forcèrent à faire la paix. Il mourut dans la Pouille en 1111, pendant qu'il préparait une nouvelle expédition contre Alexis. — Plusieurs autres princes du nom de Bohémond possédèrent après lui la principauté d'Antioche; le dernier, Bohémond VII, fut dépouillé en 1288.

BOIANO, BOIADOR. V. BOJANO, BOJADOR.

BOIARD, titre que portent les grands ou nobles de Russie, de Valachie, etc., vient de boï, bataille, parce que ce titre fut donné dans l'origine aux chefs qui entouraient le prince dans les combats. Il fut ensuite étendu à tous les premiers dignitaires de l’État. Jadis le corps de boïards était toujours consulté par le czar dans les affaires importantes. Pierre le Grand a fort réduit leur influence.

BOÏARDO (Matteo Maria), comte de Scandiano, célèbre poëte italien, d'une famille noble de Ferrare, né à Scandiano, près de Reggio, dans le duché de Modène en 1430, mort en 1494, s'attacha aux ducs de Ferrare qui lui confièrent le gouvernement de Reggio. Il composa pour le duc Hercule plusieurs poëmes dont le plus célèbre est le Roland amoureux, Orlando inamorato, épopée romanesque en 3 parties et 79 chants, tirée de la chronique de Turpin, et où l'on voit figurer les Agramant, les Astolphe, les Gradasse, les Rodomont, qui sont devenus des types immortels. Ce poëme n'était pas achevé quand l'auteur mourut; il fut imprimé en 1495 dans l'état où Boïardo l'avait laissé; en 1626, un poète médiocre, Agostini, y ajouta trois livres; quelques années après, Domenichi le retoucha et en reforma le style; enfin Berni le refondit entièrement (1541), et depuis on n'a plus guère lu que l'ouvrage ainsi refondu. On sait que le Roland furieux de l'Arioste n'est que la contre-partie de ce poëme héroï-comique. L’Orlando inamorato a été plusieurs fois traduit en français; la traduction la plus répandue est celle de Lesage, 1717, 2 vol. in-12. On a en outre de Boïardo des Sonetti e Canzoni, des poësies latines, des trad. de l’Ane d'or de Lucien et de celui d'Apulée.

BOIELDIEU (Fr. Adrien), un de nos grands compositeurs, né à Rouen en 1775, mort en 1834, commença par des romances délicieuses que Garat chantait dans les salons, fut nommé vers 1799 professeur de piano au Conservatoire, quitta Paris en 1803 par suite de chagrins domestiques, et alla en Russie où l'empereur Alexandre le nomma son maître de chapelle. Il revint en France en 1812, fut élu membre de l'Académie des beaux-arts en 1817, et passa ses dernières années à Jarcy en Brie. Ses principaux opéras sont : le Calife de Bagdad, 1799; Ma Tante Aurore, 1802; Jean de Paris, 1812; le Nouveau Seigneur du village, 1813 ; le Chaperon Rouge, 1818; la Dame Blanche, son chef-d'œuvre, 1825. Sa musique, ornée et gracieuse, est pleine de mélodie; son instrumentation est savante, mais sans vacarme, Boïeldieu forma, entre autres élèves, Zimmermann, Fétis et Adolphe Adam.

BOIENS, Boii, nation gauloise disséminée en Gaule, en Italie et en Germanie. 1° En Gaule, il faut distinguer les Boii de la Lyonnaise 1re, entre l’Elaver (Allier) et le Liger (Loire), dont le territoire répond à une partie du Bourbonnais, et les Boii de la Novempopulanie, dont le territoire est le ci-devant pays de Buch en Guyenne. Les Boii de la Lyonnaise 1re y furent placés par César. Ils descendaient d'une fraction des soldats de Sigovèse qui s'étaient établis sur le Danube et qui étaient revenus en Gaule avec les Helvetii. 2° En Italie, les Boii avaient au N. les Lingones, au S. l'Apennin qui les séparait de l’Étrurie : Bononia était leur capitale. Ils furent soumis par les Romains en 193 av. J.-C. 3° En Germanie, les Boii habitèrent la Bohème (Boiohemum), d'où ils furent chassés par les Marcomans; puis ils vinrent occuper la Bavière (Boioaria). Ces deux faits pourtant ont été contestés. — Les Tolistoboii de Galatie étaient sans doute aussi des Boii.

BOIGNE (LEBORGNE, comte de), né à Chambéry en 1751, mort en 1830, était fils d'un marchand de pelleteries. Après avoir servi en France, il passa dans l'Inde, se mit, à partir de 1786, au service du prince mahratte Sindhyah, obtint toute la confiance de ce prince, fut nommé par lui général en chef, disciplina son armée, lui assura par là de faciles victoires, et l'aida à fonder un vaste empire; il reçut en récompense les plus grands honneurs et d'immenses richesses. Il quitta l'Inde après la mort de Sindhyah et vint se fixer dans sa ville natale, où il consacra plus de 4 millions à des actes de bienfaisance et à la fondation d'établissements utiles. La Société académique de Savoie a publié à Chambéry des Mémoires sur la carrière politique et militaire du général Boigne, 1828.

BOILEAU (Nic.), surnommé Despréaux, célèbre poëte français, né en 1636 à Paris, mort en 1711, était fils de Gilles Boileau, greffier de la grand'chambre du parlement de Paris, et fut destiné au barreau. Il étudia d'abord en droit, puis en théologie; mais ces sortes d'études ne lui plaisant pas, il résolut enfin de suivre son goût et se consacra à la poésie. Il débuta par des Satires, 1660, et obtint un succès prodigieux qu'il dut à la perfection de ses vers, tout autant qu'à la malignité de ses critiques; il fit suivre les satires d’Épîtres, dans lesquelles il s'élevait encore au-dessus de ses premiers écrits ; il publia enfin l'Art poétique et le Lutrin (1672-1683), qui mirent le sceau à sa réputation et le placèrent au premier rang des poëtes modernes. Il s'essaya également, mais avec moins de bonheur, dans l'ode et l'épigramme. On a aussi de lui quelques écrits en prose, (la traduction du Traité du Sublime de Longin, les Héros de roman, Réflexions critiques), mais ils sont peu importants. Louis XIV, appréciant son mérite, l'admettait souvent auprès de lui ; il le nomma son historiographe avec Racine et lui assura une pension. L'Académie française le reçut dans son sein en 1684. Dans ses dernières années, il quitta la cour et se retira à sa campagne d'Auteuil; il mourut d'une hydropisie de poitrine. Quoique mordant dans ses écrits, Boileau était indulgent dans sa conversation et avait le cœur excellent : on cite de lui plusieurs traits de générosité. Il fut l'ami des plus grands hommes de son siècle, particulièrement de Molière et de Racine. On lui reproche d'avoir gardé le silence à l'égard de La Fontaine, dans la crainte de déplaire à Louis XIV, et d'avoir été injuste envers Quinault. Boileau a été à juste titre appelé le Légis-