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paysage familier, une similitude de mélancolie, ici et là, dans la prairie, parmi les rocs, le cap de sable ! A la vérité, le ciel tremble, obscur, d’éclatantes cascades roulent sur les glaces vives ; l’épouvante de la Nature, et une multitude d’atroces catastrophes font prévoir l’approche de la Mort.

Voilà ce qui nous terrine. C’est elle que revêtait la pauvre et candide robe scintillante de flots et de sel où semblait drapée Virginie, quand nous la retrouvâmes, étendue dans les algues, petite fiancée silencieuse, hélas ! Certes nous ne songions plus aux trésors de tendresses que la mauvaise mer ensevelit, tant l’affreuse présence, sombre et immobile, nous épouvantait.

Oui, ce qui nous impressionne, ce n’est pas le spectacle épars des fugaces conjonctures, où apparaissent les hommes, mais les vives, les puissantes idées qu’ils représentent. Il semble que chacun soit dépositaire du mortel secret héroïque qu’un Dieu, — tel un foudre — y jeta.

Ah ! peu importe l’exactitude de ces héros de qui les poètes rapportent l’existence ! Seul leur destin nous passionne.

De leur gloire, de leur infortune, personne ne réclame l’authenticité. Les suaves amants que Bernardin s’est plu à conduire tendrement parmi l’inflexible étendue des plaines, je ne pense pas que leur sort ferait davantage palpiter quiconque en saurait la véracité. Car leurs turbulences ne nous prosternent point ; il est possible