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Elle sourit sans nul subterfuge et cette tendre allégresse m’étonne. Afin d’excuser mes méditations cette Petite Frivole me suffit. Parce qu’elle lave mon linge, parce qu’elle dresse la nappe, parce qu’elle fait briller l’étain des urnes rondes, je n’imagine point d’autre prétexte pour mes axiomes et mes dissertations. Il ne m’eut pas été possible d’en choisir aucun qui fut plus exquis, et je n’en vois point de moins apprêté. Mais ne songez pas, cependant, que je n’entretienne mon amie que des sentences dont se compose ce livre. Hélas ! chère petite fille, témoignez de ma grâce. Je sais des sujets qui vous conviennent mieux quoiqu’ils paraissent moins poétiques. Quand je vous pressais dans mes bras en flammes, nous eûmes souvent, sans aucun doute, de plus émotionnants colloques. Les entretiens que je rapporte ne sont guère réels, légitimes, ni sûrs, car jamais je n’occupe Clarisse de mes syllpgistiques pensées, et elle connaît moins ma philosophie que le magnifique et pompeux jargon dont se servent les amants heureux et duquel l’amour a créé les termes.

Toujours je devine ce que songent ses vœux, mais comme sa pudeur me les voile, toujours je les devine et je les réalise. Il lui plaît de jouer l’innocence, quand ce sentiment ne me trompe jamais ! Elle feint d’infinies lassitudes, si ardentes et si amoureuses qu’elle semble en réclamer de pires. Elle abuse d’élégiaques langueurs dans l’instant qu’elle croit favorable à m’en faire désirer qui soient joyeuses et vives. Lorsqu’elle se targue de ses vertus, ce n’est point du tout afin qu’on y croie, c’est seulement de peur que je n’y