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avons accompli un harmonieux périple, et, tour à tour, les continents où habitent les nations réelles et ceux que peuplaient les poètes, l’île de Thulé et Lemnos nous ont vus. Cependant ce passe-temps nous devint monotone. D’ailleurs, nous avions entrevu le monde. Rien ne nous était ténébreux. Après d’étranges explorations, nous convînmes de rester chez nous. J’attendais que Clarisse proposât ce dessein afin de le mettre à exécution, ainsi que je le désirais depuis des semaines et des jours. Désormais, nous nous occupâmes avec véhémence et avec douceur, et la blanche muraille de notre humble enclos forma la limite de notre univers.

A moins que trop de peine n’accablât mon amie je négligeai les tragédies et ces feintes turbulences cessèrent de nous toucher. Leur imposture me parut vaine, je n’y eus que rarement recours. D’ailleurs, parfois encore, Clarisse en souhaite l’horreur, les chimériques amours ou l’effrayant tumulte.

Comme nous nous aimions tendrement, Clarisse, peu à peu, s’habitua à ne plus rien solliciter qui ne dut augmenter ma joie. Elle s’avisa d’une foule de petites attentions à quoi elle se serait soustraite si notre impérieuse réclusion n’avait prêté de l’importance à des songes et à des objets qui en étaient naguère tout à fait dépourvus. Le certain c’est qu’elle s’occupa. Elle se fit tendre et ingénue. A l’écarlate parc des riches Hespérides elle préféra enfin notre "humble et pauvre enclos qui est tout froid et bleuissant sous le grésil.

Pour moi, j’entrepris mon propre examen. Sur le