Page:Bouhélier - L’Hiver en méditation, 1896.djvu/205

Cette page n’a pas encore été corrigée

n’en sais pas de plus certain. Je ne connais rien qui soit comparable à ce héros, si surprenant, qui fut tour à tour pirate et poète, traficant, guerrier. Celui-ci a usé ,sa jeunesse à attendre. Il médita d’extraordinaires magnificences. Il a décrit’ les lieux de sa nativité, son héroïsme horrible et âpre, les fabuleuses cités"où - H aurait dù vivre. Il appelait.le sang et la haine. Il les a aperçus venant par la prairie. Il en a eu la prévision surnaturelle. Son œuvre, exactement, est l’augure de sa vie.

Arthur Rimbaud est né à Charleville, le 2o octobre 1S54 ; Les actions qu’on lui attribue ont un merveilleux héroïque, terrible. A seize ans il avait écrit les plus pompeuses des élégies. Il y parle de somptueuses florides, de végétations sous-marines, de sanglantes îles, d’archipels d’astres ! On dirait qu’il a accompli -le périple des régions connues. Des glacés du pôle aux rouges tropiques, du coteau au vallon et des plaines aux châteaux, je le vois, tragique, voyageant. Son enfance fut hantée par de sauvages peuplades. Peut-être étâient^ce seulement des souvenirs de romans. Fenimore Cooper dut l’impressionner. Des Mohicans, des PeauxRouges-’ ld poursuivent. Dans son imagination cela prend de farouches aspects ; il eit a composé de sonores descriptions ;d’une fiévreuse et «ruelle luxure. D’ailleurs on ne sait rien qui demeure bien précis. Il faut reconstituer sa sombre adolescence ! — A Charleville, petite cité réglée, placide, il y . a un jardin public, tout odorant de pins, de verveines et d’oeillets. Chaque jeudi, d’éclatants concerts, sous de hautes et opaques charmilles, par les trente bouches d’airain’des