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Le spectacle d’une tristesse contrastée, familiale, plausible, cette pénultième d’un chuchotement dont nous ignorons le but et le sens, ces noms — Zoé, Annie — si intimes, si exquis, par quoi soudain nous apprenons des races et des idylles qui toujours nous resteront lointaines, ces secrets, par hasard, surpris, tant de joies, de larmes et d’émois, est-il rien qui vaille ce mystère, ce jeu d’une douceur tremblée et tragique ?

Bons repos aux villages d’exil — O le coq, l’allée, le château ! — Je sais tous les ciels vagabonds. — On marche, la route bondit, caillouteuse et aride, toute pressée de petites maisons, toits bas, puissantes arcades bien arc-boutées ! Nul ne foule la poudreuse blancheur des pavés clairs. Partout le silence et l’ennui. Les hommes travaillent dans la prairie. Sur l’eau pesante du fleuve, les femmes rythmiquement battent de candides linges qui écument. Les basses maisons regardent par d’étroites, de naïves, de clignotantes fenêtres. On n’entend point le bœuf, la basse-cour s’est tue. On a peur, un peu, de troubler l’intimité assoupie et usuelle, profonde des choses.

On marche, il y a là une blanche petite place toute glacée et nue, où bruissent de glauques pins en quinconces. — Le ciel frissonne d’une chute de brises. — Pastorale, l’église dresse son coq d’airain ; sur les murailles flamboient des lichens vifs. Au portail se gonflent, s’effeuillent des acanthes.

Près d’un puits, palpite une fraîche cruche posée. — On marche, ici et là, silencieusement. A un seuil, une femme regarde et attend. De profondes portes