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CHAPITRE II

L’OPPOSITION DES CASTES ET LA FAMILLE


Les groupes élémentaires de la société hindoue, non contents de se spécialiser, se repoussent en quelque sorte les uns les autres.

C’est en cherchant les origines de cette répulsion mutuelle qu’on a été amené à rapprocher la caste de la famille. M. Senart surtout a poursuivi ce rapprochement[1].

M. Senart, plus encore que MM. Nesfield et Dahlmann, est partisan d’une explication « naturelle » du régime des castes. Il condamne toute théorie qui tendrait à le présenter comme une invention récente. Pour découvrir les germes de groupements aussi nombreux, séparés par des règles aussi rigoureuses, c’est dans la nuit des temps, c’est au plus lointain passé de l’histoire hindoue qu’il nous fait remonter.

Est-ce à dire qu’il nous montre, dès les temps védiques, les castes constituées ? Les renseignements tirés des Védas nous permettent-ils d’en induire l’existence ? La question est encore controversée. Les uns persistent à croire, avec M. Zimmer, que si l’on fait abstraction de l’hymne fameux où l’on voit les quatre castes classiques naître des membres de Purusha – hymne postérieur, de l’aveu de tous, au reste des hymnes védiques – rien, dans les Védas, ne permet d’affirmer que la population hindoue ait été d’ores et déjà divisée en groupes héréditairement spécialisés. Le

  1. Les Castes dans l’Inde. Cf. Lyall, Études sur les mœurs religieuses et sociales de l’Extrême-Orient, ch. vii.