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mêmes superlatifs, ils s'empruntent aisément leurs attributs 533. Ils s'accouplent, se mêlent, se fondent les uns dans les autres. Ils ne possèdent pas plus de réalité distincte que n'en possèdent les nuages.

D'ailleurs la faute en revient peut-être, pour une part, à la prépondérance du sacrifice. Faut-il s'étonner que les dieux ne soient que figures vagues et flottantes puisqu'ils ne sont guère ici que des intermédiaires, pour ne pas dire des accessoires par où s'exerce sur les choses la force du rite ? En tout cas c'est en cette force que s'absorbe toute réalité. Et il est aisé de remarquer que les Upanishads continuent de concevoir, sur le type de cette force, la réalité suprême.

Il n'y a qu'un être réel, nous disent les Upanishads : celui auquel ne con­vient aucune des qualités sensibles, et auquel seul convient la qualité d'être. Il n'est ni ceci ni cela, mais il est tout, et seul, il est. Comment les philosophes conçoivent-ils cette substance universelle ? Sur le type du moi, sans doute. Ils l'appellent alors l'Atman. Il est permis de voir dans cette notion du « souffle » essentiel une sorte de résidu spiritualisé de l'animisme primitif. Mais en même temps la réalité est présentée sous un autre aspect : sous l'aspect de cause plutôt que sous l'aspect de substance. Elle s'appelle alors Bráhman. Or qu'est-ce que le Bráhman sinon précisément ce pouvoir magique dont les sacrifica­teurs disposent ? Prière, formule, charme, rite, le Bráhman est essentiellement puissance créatrice 534. Dans les mains de la spéculation métaphysique il devient le principe actif de l'univers. Mais la notion métaphysique garde la marque de son