Page:Bouglé - Essais sur le régime des castes.djvu/222

Cette page n’a pas encore été corrigée



Il faut descendre de ces généralités et, avant de balancer inconvénients ou avantages, noter d'abord, par une méthode plus analytique, les couleurs pro­pres que le régime des castes a pu imprimer en Inde aux différents aspects de la vie économique.

C'est sur les habitudes de la consommation que l'empreinte est la plus visible. De quelque côté qu'il faille chercher l'origine ou les origines du régime des castes, on s'accorde aujourd'hui à reconnaître qu'il est essentiel­lement une institution religieuse 420. Des sentiments de nature religieuse le soutiennent et l'entretiennent : une espèce d'horreur sacrée, la crainte du péché dégradant, empêche les communions, mélanges ou contacts de races, comme elle entrave ou retarde les changements de professions. Ce sont les degrés de pureté qui marquent le plus clairement ceux de la hiérarchie sociale : les rapports plus ou moins intimes que leurs membres peuvent soutenir avec le prêtre-né fixent le rang des castes. Des sentiments qui se développent ainsi, au contact des petits groupes fermés, spécialisés et hiérarchisés qui composent la société hindoue, il ne faut pas dire seulement qu'ils sont une conséquence et comme un épiphénomène de la vie religieuse en Inde : bien plutôt ils en cons­tituent l'essentiel, ils en forment le noyau. On a souvent remarqué que, flottante et tolérante au-delà de toute expression en matière de dogmes, la religion hindoue n'est stricte et définie qu'en matière de pratiques : et les pratiques qui lui tiennent le plus à cœur sont précisément celles qui font durer le régime des castes. Le respect de ce régime avec le culte de sa propre supé­riorité, c'est là ce que le Brahmane enseigne de plus clair 421.

Cette compénétration de la tradition religieuse et du système social, si elle ne prédestine nullement les Hindous à