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ry qui conserve le caractère d’amant. Dans les premiers jours de leur mariage, il avoit eu des complaisances pour elle, dont elle auroit esté fort satisfaite, si elles eussent duré ; mais Guerin, qui s’apperçeut qu’elle en abusoit, luy fit sentir, un peu trop tard, qu’elle s’estoit donné un maistre. Elle souffrit impatiemment les premières obéissances où il voulut la soumettre ; elle luy reprocha mille fois qu’il n’estoit que ce qu’elle avoit bien vouleu le faire ; que, neantmoins, il en agissoit d’une maniere qui le rendoit indigne de ce qu’elle avoit fait pour luy, mais qu’elle sçavoit la vengeance dont une femme spirituelle se servoit, quand les mauvais traittemens d’un mary l’obligeoient à avoir recours à ces sortes de remedes.

Guerin luy dit, à son tour, qu’elle se trompoit fort, si elle pretendoit conserver ses manieres coquettes après leur mariage ; qu’il pretendoit qu’elle vecust comme toutes les femmes raisonnables, c’est-à-dire qu’elle ne se meslast que de joüer la comedie et de conduire son menage. Ils eurent plusieurs differens sur ce chapitre ; à la fin, elle a esté obligée de prendre le party de la patience, et, pour toutes intrigues, elle est réduite à un certain Aubry qui demeure au mesme logis ; il a mis si bon ordre à sa conduite qu’elle n’oseroit voir personne, que par sa permission.

Heureusement pour elle, elle a un petit gar-