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où le Roy donnoit ce divertissement, qu’elle devint folle du Comte de Guiche, et que le Comte de Lauzun devint fou d’elle. Le dernier n’espargna rien pour se satisfaire ; mais la Molière, qui estoit entestée de son héros, ne voulut entendre à aucune proposition, et se contentoit d’aller pleurer chez la Du Parc l’indifference que le Comte de Guiche tesmoignoit pour elle.

Le Comte de Lauzun ne perdit pas pour cela l’esperance de la faire venir où il souhaittoit, l’experience luy ayant appris que rien ne pouvoit luy résister. Il connoissoit, outre cela, le Comte de Guiche pour un homme qui comptoit pour peu de bonne fortune le bonheur d’estre aimé des Dames. C’est pourquoy il ne douta pas que ses maniéres indolentes ne rebutassent enfin la Moliere, et que son Etoile ne produisist alors dans son cœur ce qu’elle avoit produit dans celuy de toutes les femmes à qui il avoit vouleu plaire. Il ne se trompa pas ; car la Moliere, irritée des froideurs du Comte de Guiche, se jeta entre les bras du Comte de Lauzun, comme un azile qui pouvoit la garantir d’une seconde rechute pour un ingrat. Un Lieutenant aux Gardes et beaucoup d’autres jeunes gens se mirent de la partie pour la consoler.

L’Abbé de Richelieu, qui avoit esté averty de tout ce fracas, la faisoit epier avec soin et