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DEUX DE TROUVÉES

— Eh bien, capitaine, voici ce que j’ai à vous dire : je suis le père de l’une de ces jeunes filles et l’autre est sous ma protection, vous sentez que leur vie et leur honneur me sont aussi précieuses que ma propre vie.

— Sir Gosford, vous êtes un noble père, lui dit le capitaine ; vous veillerez sur vos filles dans la cabine.

— Non, capitaine. Je me battrai sur le pont avec vous.

— Et pourquoi faire ? Ne serez-vous pas bien mieux auprès de vos enfants pour les rassurer et veiller sur elles ? Retournez maintenant les trouver et le plus tôt vous pourrez descendre sera le mieux. Surtout donnez-leur à entendre que la corvette est un vaisseau de guerre et non un pirate.

— Croyez-vous qu’il y ait actuellement quelque danger ?

— Non, pas encore, leurs boulets ne pourront pas nous atteindre de quelque temps. Allez et je vous dirai encore un mot avant le combat.

Pendant que le maître d’équipage faisait exécuter les ordres du capitaine, celui-ci, un bras passé par dessus l’étai de misaine, réfléchissait à la terrible responsabilité qui en ce moment pesait sur lui. Il se figurait les atrocités que commettraient les pirates s’ils s’emparaient de son navire, son cœur se serrait dans sa poitrine et il tressaillait involontairement. « Oh ! non, se dit-il à lui-même, oh ! non, avant que cela arrive, ils me marcheront sur le corps ou je ferai sauter mon vaisseau. On peut mourir avec honneur, cela n’arrive qu’une fois ; mais vivre pour voir un tel spectacle, oh ! jamais ! » Sa figure s’était ani-