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UNE DE PERDUE

fut vert et dont la couleur tirait actuellement sur celle du tabac, un large fauteuil rembourré en maroquin jadis rouge, quelques papiers épars sur la table, tel était le cabinet où nous devons entrer, pour assister à la scène qui s’y passa le 28 octobre 1836, trois jours après la publication du testament dont nous avons parlé dans le premier chapitre de cette histoire.

Un homme de cinquante à cinquante-cinq ans, mais qui paraît en avoir soixante, aux cheveux courts et grisonnants, que recouvre une petite calotte dont l’étoffe se perd sous une épaisse couche graisseuse, est assis dans le fauteuil. Les deux coudes appuyés sur sa table et la tête encaissée entre ses deux mains, il semble absorbé dans la lecture d’un document qui se trouve devant lui. Deux bougies jettent leur vive clarté sur le document ; l’espèce d’ombre que ses mains projettent sur sa figure, empêche de distinguer la contraction de ses lèvres et les plis qui sillonnent son front chauve et aplati, fuyant en arrière comme une tête de serpent.

De temps en temps, il regarde à une pendule en bois qui est au fond de son étude, puis il se remet à lire le document que, pour la dixième fois, il a déjà parcouru.

— Il est en règle, s’écrie-t-il à haute voix et se parlant à lui-même, il est en règle ! Comment faire ? Cinq millions en biens fonds et en bel et bon argent !… Et le docteur Rivard, car c’était lui, s’était levé, et après avoir parcouru deux à trois fois d’un pas rapide l’étude où il était, s’arrêta devant l’horloge.

— Neuf-heures trente-cinq minutes ! mais que peut-il donc faire ? Je ne comprends pas ce retard. Il aurait être ici à neuf heures précises. Je vais