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UNE DE PERDUE

« Cependant, malgré notre effroyable position, nous ne perdîmes pas courage ni tout espoir. Nous fîmes un petit radeau, que nous avions solidement attaché avec des cordages.

« À peine nous étions-nous éloignés de quelques arpents du navire, que nous le vîmes plonger en avant, puisse relever lentement ; un instant après, le pont, cédant à la pression de l’eau, se rompit avec un bruit sourd, une masse d’eau jaillit comme une trombe, toute la mâture du navire trembla, puis il s’enfonça dans les abîmes pour ne plus reparaître.

« Toute la nuit suivante nous fûmes ballottés au gré des vagues ; notre petite voile blanche suffisait à peine pour nous diriger.

« Vers deux heures de l’après-midi, nous crûmes distinguer un navire dans le lointain. C’en était un en effet ; c’était un brig anglais qui faisait route pour Calcutta. Il nous avait aperçus, et nous recueillit à bord…

« Je m’étais rendu utile dans le voyage. Le capitaine me proposa de me charger d’une pacotille qu’il voulait envoyer à Canton. J’achetai à Calcutta plusieurs caisses d’opium. Mon voyage à Canton fut heureux. Je vendis avec profit la pacotille que m’avait confiée le capitaine, ainsi que mon opium. Revenu à Calcutta j’y trouvai mon capitaine auquel je rendis compte de mes transactions. Il frêta une barque qu’il expédia à Manille ; je m’embarquai comme subrécargue, avec un joli assortiment de marchandises que j’avais acheté pour mon compte. Je fus heureux ; et après avoir vendu ce que j’avais emporté, je pris à Manille passage sur un trois mâts Américain qui retournait à Boston, où j’arrivai, juste dix huit mois après mon départ.