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UNE DE PERDUE

par mer, ils se trouvaient bloqués, et ne pouvaient plus sortir ! Les conjectures de Lafitte et ses prévisions s’étaient cependant vérifiées. Depuis plus de vingt-cinq ans, les pirates allaient et venaient sans que jusqu’alors on eut pu découvrir leur retraite. On s’était longtemps imaginé que le rendez-vous était à l’île de Los Pinos, au sud-ouest de l’île de Cuba, ou bien encore dans les îles et les langues de la Baie de Barataria, à la Louisiane.

Le fameux Lafitte n’existait plus depuis longtemps, mais il avait laissé à sa place, avec le titre de général, son lieutenant Antonio Cabrera, qui ne lui cédait ni en bravoure ni en audace.

Cabrera était le chef et le maître de tous ces pirates. Deux à trois actes de vigueur lui avaient valu l’obéissance la plus passive de leur part. Il avait reçu dans sa jeunesse une éducation distinguée, et était le fils cadet d’une illustre famille de Cadix. D’un caractère emporté, il avait été obligé de fuir sa patrie, afin d’éviter les rigueurs de la loi pour un duel dans lequel son adversaire fut tué. Après s’être longtemps caché dans les bois, il s’était joint à une bande de brigands, et enfin avait trouvé dans les vaisseaux de Lafitte le théâtre où il put déployer toute l’énergie de son caractère.

Remarqué par Lafitte pour son courage et par les pirates pour son audace, il remplaça bientôt le lieutenant de Lafitte, qui avait été tué en montant à l’abordage d’un navire marchand.

Quand Lafitte abandonna la vie de pirate et le siège de ses exploits, Cabrera fut unanimement choisi pour chef par tous ceux qui avaient partagé ses périls et admiré son courage, son sang-froid et son admirable