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UNE DE PERDUE

Pas un mot, pas un murmure, pas un chuchotement ne se fit entendre. La foule, qui s’était de plus en plus augmentée depuis l’ouverture de la séance, occupait toute la salle, jusqu’aux places réservées aux avocats ; chacun, le cou tendu, prêtait l’oreille pour entendre les paroles du juge.

Le juge, après avoir parlé du mérite du défunt et de la persévérante industrie du défunt, pour acquérir une si large fortune ; après avoir déploré l’absence de tout héritier pour en prendre la jouissance ; après s’être appesanti sur l’immense responsabilité de celui qui en serait l’administrateur au nom de l’État ; après s’être étendu sur les qualités du docteur Rivard, sur son caractère, son intégrité, sa ponctualité, sa réputation, se préparait à prononcer son jugement, quand monsieur Préau se leva encore une fois et dit :

— Au risque de passer pour importun aux yeux de la Cour et de cet auditoire, je suis obligé de prier son honneur de vouloir bien me permettre de dire, que je viens d’être informé qu’une personne désire être entendue devant la Cour, avant que votre honneur prononce son jugement.

— Je n’aime pas à être interrompu d’avantage, répondit le juge d’un ton sec.

— Mais votre honneur…

— Monsieur Préau !

— Peut-être cette personne a-t-elle quelque chose d’important à déclarer.

— La Cour a déjà attendu assez longtemps.

— Je suis fâché d’être obligé de remarquer, qu’il sied mal à une Cour de justice de mesurer les intérêts du public sur la longueur d’une séance ou sur le