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DEUX DE TROUVÉES

au milieu des scènes les plus excitantes. Poli, affable et gai, il était l’âme et l’agrément des sociétés où il se trouvait. Franc et ouvert, il attirait la confiance. Brave jusqu’à la témérité, mais sans fanfaronnade, généreux jusqu’à la prodigalité, il eut beaucoup d’amis et encore plus d’envieux. Ses matelots l’aimaient comme on aime un père ; il était bien leur père par l’attention et les égards qu’il avait pour eux. Les preuves qu’il leur avait données de son habileté comme marin, dans les plus périlleuses situations, lui avaient acquis leur plus entière confiance.

Les exercices de la mer et une vie pleine d’activité et de dangers avaient développé avantageusement toutes ses qualités corporelles et intellectuelles ; son front haut annonçait l’intelligence. Son œil noir et brillant semblait percer jusqu’au fond de la pensée. Sa bouche petite, ses dents régulières et blanches, ses lèvres vermeilles, semblaient inviter le plaisir quand il souriait. Sa haute stature, ses épaules musculaires et charnues, ses bras nerveux, sa taille souple, tout annonçait chez le capitaine Pierre, une force et une activité extraordinaires. Mais s’il était grand, robuste et vigoureux, toute cette vigueur était gracieuse, parce qu’elle était symétrique sans avoir rien de roide ni de gêné. Plus noble tête ne se balança peut-être jamais plus gracieusement sur d’aussi larges épaules et une aussi vaste poitrine.

Tel était le capitaine Pierre ou ce « gueux de Pierre », comme l’appelait feu M. Alphonse Meunier.

Laissons-le avec Monsieur le Consul Anglais et retournons un instant à la chaloupe, que nous avons laissée au port.