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UNE DE PERDUE

dans la voiture, attendant le retour de Pluchon, auquel il avait recommandé de voir lui-même à ce que le poison fut administré au capitaine.

Au bout d’un quart d’heure environ, Pluchon revint à la voiture dans laquelle il monta.

— Mauvaise nouvelle, docteur, les Coco jurent qu’ils ne descendront pas cette nuit dans le cachot ! ils sont saisis d’une crainte superstitieuse. C’est ce soir la veille du jour des morts, et ils ne voudraient pas y descendre pour tout au monde.

— C’est bien malheureux, il serait si important d’en finir dès ce soir !

Et le docteur se mit à réfléchir, tout en retournant vers la ville au pas de son cheval. Au bout de quelques instants le docteur s’écria : « j’ai un moyen ; » et il donna un vigoureux coup de fouet à son cheval en lui disant « marche Balais ; » et Balais partit au grand trot, à travers la boue et au milieu de l’obscurité.

Au bout de la rue Perdido, qui aboutissait à la cyprière, il y avait sur la lisière du bois une vieille case de nègre. Cette case était habitée par un nègre Congo, qui avait acheté sa liberté de son maître moyennant la somme de quatre mille piastres, qu’il s’était procuré, personne ne put savoir comment. Ce nègre avait un étrange commerce ; sur des tablettes, au fond de sa case, il y avait des fioles, des bouteilles de toutes grandeurs et de toutes formes, contenant les unes des poudres, les autres des liquides bleus, blancs, verts, rouges, jaunes, noires. Toutes ces bouteilles étaient hermétiquement fermées. Sur de sales petits morceaux de papiers collés sur ces bouteilles on lisait : poison pour les punaises, pour les