Page:Boucherville - Une de perdue, deux de trouvées, Tome 1, 1874.djvu/161

Cette page a été validée par deux contributeurs.
156
UNE DE PERDUE

avant de mourir et continuer en son nom les bonnes œuvres qu’il faisait durant sa vie. Voici, M. le juge, ce que j’ai pensé faire du legs qu’il m’a fait et que j’accepte afin de l’associer à une action charitable ; je me suis décidé à accepter la tutelle d’un pauvre orphelin, qui se trouve actuellement à l’Hospice des Aliénés. C’est un jeune enfant de douze à treize ans, dont le cerveau malade l’avait fait mettre parmi les aliénés ; quoiqu’il n’ait pas une intelligence bien développée, j’ai pu remarquer beaucoup de bon sens et beaucoup de raison dans l’enfant ; il n’est point du tout aliéné, mais il est d’une telle timidité, a été tellement négligé, tellement maltraité, tellement bafoué, battu, qu’il a peur de la moindre chose, du moindre bruit. Je le soigne depuis longtemps, et j’ai contracté un véritable attachement pour l’enfant. Comme il est nécessaire que toute personne, qui veut se charger de quelqu’un des malades de l’Hospice, ait à assurer une certaine somme d’argent, par forme de rente viagère, au malade, avant de pouvoir le faire sortir de l’institution, je me suis décidé à convertir les trois mille piastres, que me lègue M. Meunier, en quelque bien-fonds qui deviendra la propriété du pauvre orphelin.

— Vous faites là une belle et noble action, docteur, permettez-moi de vous dire, sans flatterie, que vous êtes le meilleur et le plus saint homme que je connaisse ! Et comment s’appelle votre futur pupille ?

— On ne lui connait pas d’autre nom que Jérôme.

— Quels sont ses parents, vivent-ils encore ?

— On n’a jamais connu ses parents, ni leurs noms, ni leur origine, ni leur domicile ; on ne sait s’ils vivent. Mais comme j’ignore les formalités à suivre