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COMPAGNON DE JEANNE D’ARC.

sur-Seine dans leur dessein de regagner la Loire, n’est-il pas parmi ces hommes de guerre, qui, avec Jeanne, se réjouissent ostensiblement de cet échec[1]? Lorsque la Pucelle, impatiente de marcher sur Paris, quitte subitement la cour, il la rejoint à Senlis, et l’accompagne à la tête de l’armée jusqu’à Saint-Denis[2]. Il est à croire que Jeanne

    Charles VII, publiées par M. P. Marchegay. Le roi, après avoir énuméré les glorieux services, par lesquels Gilles avait contribué au salut de la France, et pour en perpétuer la mémoire, ajoutait à l’écusson du seigneur de Rais une bordure des armes de France : « une orleure de noz armes en laquelle aura fleurs de liz d’or semées sur champ d’azur ainsi et par la forme et manière qu’il est en cest endroit pourtrait, figuré et armoyé. » Le dessin en peinture se trouve au milieu des sept dernières lignes de l’original. « Chartrier de Thouars. Original en parchemin qui a souffert de l’humidité. Il n’a été ni scellé ni enregistré, probablement parce que, ajournées à cause de la guerre, ces formalités ne tardèrent pas à être rendues impossibles par le trop célèbre procès, qui eut pour conséquence le supplice du maréchal de Rais. » (Note de M. P. Marchegay.)

  1. Le 4 août, l’armée se trouvait près de Bray, dont les habitants avaient promis de se rendre et de livrer ainsi le passage de la Seine. La Trémoille et les courtisans, qui dominaient l’esprit encore faible de Charles, avaient hâte de venir se reposer sur les bords de la Loire d’une campagne qui les avait beaucoup fatigués, en les tirant de leur molle inactivité. Mais, durant la nuit, une troupe d’Anglais s’étant établie dans la ville, les courtisans, qui seuls voulurent tenter l’attaque, furent facilement repoussés. Quant à l’armée, à la Pucelle, à tous les capitaines, qui estimaient justement leur œuvre inachevée, ils avaient vu cette entreprise avec indignation. Quand ils la virent échouer, ni le maréchal de Rais, ni les comtes de Laval, ni René d’Anjou, qui avait rejoint la Pucelle, ni Jeanne d’Arc, ne cachèrent leur joie. (Procès, t. IV, p. 26, 86, 87, 197, 199, etc. ; Désormeaux, t. I, p. 379, etc.)
  2. Attardé qu’il était par les soumissions qui lui arrivaient de toutes parts, Charles VII oubliait Paris, au grand désespoir de Jeanne. Elle, à qui son grand bon sens démontrait avec évidence que, seule, la possession de Paris pouvait assurer la durée à tant de victoires, vint un jour trouver le duc d’Alençon : « Mon beau duc, lui dit-elle, faites appareiller vos gens et ceux des autres capitaines, je veux aller voir Paris de plus près que je ne l’ai vu. » C’était là sa manière habituelle de faire, lorsqu’elle voulait briser les liens dont on cherchait à enchaîner son activité. Le mardi, 23 août, elle partit donc avec une troupe assez nombreuse, laissant le roi et ses conseillers à leurs incertitudes. Le maréchal de Rais et celui de Boussac, aimant mieux être avec la Pucelle qu’avec les courtisans, se rallièrent à elle avec toutes leurs troupes ; et, le vendredi suivant, 26, sous la conduite de Gilles de Rais, la Pucelle et ses gens vinrent loger à Saint-Denis. Le même jour, le roi partait aussi de Compiègne, à son corps défendant, « et semblait qu’il fut conseillé au contraire du vouloir de la Pucelle, du duc d’Alençon, et de ceux de leur compagnie. » On voit bien, hélas ! que tous n’étaient pas dévoués à la jeune fille : mais convient-il d’aller chercher la jalousie et la trahison parmi ceux qui lui demeurèrent fidèlement attachés, parmi les capitaines « de sa compagnie ? »